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Au cinéma bientôt : « Rosalie » : l’émancipation d’une femme à barbe au XIXe siècle

Un film délicat à la beauté académique et aux questionnements modernes, troublant et attachant. L’interprétation de Nadia Teresziewicz y est pour beaucoup, avec Benoît Magimel en valeur toujours sûre

Pour cette avant-première à l’UGC Ciné Cité de la Défense, la réalisatrice Stéphanie Giusto et Nadia Teresziewicz viennent saluer les spectateurs avant le début du film et nous promettent de revenir pour en discuter après la projection (voir en fin d’article).

1870, en France, Rosalie (Nadia Tereszkiewick) est une jeune femme atteinte d’hirsutisme. Couverte de poils de la tête au pied, elle cache bien son secret en se rasant le visage. Elle dispose d’une belle dot qui va inciter Abel (Benoît Magimel) à l’épouser car il est au bord de la faillite. Il découvrira après le mariage qu’il a épousé une femme à barbe et la repousse. Mais dès lors, Nadia n’a plus envie de le cacher et va vivre son naturel au grand jour.

Stéphanie Di Giusto s’est librement inspirée d’une histoire vraie, celle de Clémentine Delait, tenancière d’un bar des Vosges qui s’affichait avec une longue barbe à la même époque que celle choisie pour son film. Mais elle insiste : il ne s’agit pas d’un biopic, elle a inventé le personnage de de son film.

D’emblée, le décor, la nature et la lumière sont belles ; le lieu de tournage est remarquable, un ancien village sidérurgique fondé en 1623, abritant les Forges des Salles, les plus anciennes de Bretagne alignant une impressionnante rangée de douze maisons mitoyennes de forgerons, en belle pierre.
Il vaut mieux avoir lu le synopsis pour comprendre ce qui scelle le destin commun de Rosalie (Nadia ) et Abel car on plonge presque directement dans le bain d’un mariage entre deux inconnus. Peut-être une façon de symboliser le changement de vie brutal qui s’impose à l’héroïne.
C’est un drame historique, une histoire sur la difficulté de vivre sans être dans la norme, de faire face au jugement, d’oser vivre sa différence. Cette histoire ne sombre pas dans les pièges de la sensiblerie ou du manichéisme. Rosalie a la force parce qu’elle a la foi, au propre et au figuré, mais elle est aussi prête à tout abandonner face à certaines épreuves. Mais elle a cette volonté, l’envie de vivre et telle qu’elle est sans avoir à se cacher, et elle fonce. Face à la petite communauté du village, ça passe, puis ça casse. Face à Abel, ça casse puis ça passe, l’amour partagé verra le jour entre ces deux personnages finalement tous deux profondément blessés. Nadia Tereszkiewick porte admirablement son personnage et sa barbe, qui n’est pas un postiche mais des poils appliqués un par un chaque jour précédant le tournage pour mieux s’imprégner de cette pilosité. Force est de constater qu’on ressent le naturel et le bien-être de Rosalie quand elle se libère de son secret aux yeux de tous. Benoît Magimel est parfait aussi, comme d’habitude, et ce duo puissant porte le film. S’il répond aux standards d’un cinéma très classique, cet académisme n’entraîne pas d’ennui. Cela dit le rythme aurait bénéficié d’une durée elle-même classique, mais 1h30 ne semble plus très à la mode au XXIe siècle. Les scènes finales sont fortes et pleines de symboles, la musique en point d’orgue, composée par la pianiste polonaise Hania Rani et que l’on apprécie pleinement tout au long du film.

Anna Biolay, Nadia Tereskiewicz et Sophie Di Giusto le 8 avril à la Défense

Sophie Giustio, Nadia Tereskiewicz et Anna Biolay se sont livrées au jeu des questions réponses des spectateurs après la projection. La réalisatrice nous en appris plus la genèse du film, les aspects techniques concernant la barbe de Rosalie que Stéphanie Di Giusto confirme être un sujet de curiosité récurrent. Nadia Tereszkiewicz nous a elle aussi parlé de cette pilosité artificielle et de son ressenti d’actrice, des modalités de sa rencontre avec Benoît Magimel, des problématiques dans l’air du temps qui l’ont séduite dans son personnage et l’histoire, entre autres sujets.

« Rosalie » de Stéphanie Di Giusto avec Nadia Tereszkiewick, Benoît Magimel, Benjamin Biolay, Guillaume Gouix – durée 1h51 Sortie : 10/04/2024

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