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Cinéma : « Pauvres créatures » : excentricité et prétention sur une mer de désolation

Un film long, froid et malsain qui se veut intellectuel de Yórgos Lánthimos. Un réalisateur certes original et que la critique encense pour un film de mauvais goût déjà primé que l’on ne vous incitera pas aller voir.

Le réalisateur et dramaturge grec, frais cinquantenaire, a le vent en poupe. Multi-primé au festival de Cannes (Canine et The Lobster notamment), il y a eu ensuite La favorite (2018), film historico-satirique dans l’Angleterre du 18e siècle, déjà avec Emma Stone, très bien accueilli aussi. Pauvres créatures ne va pas dépareiller dans ce bain d’acclamation unanime, puisque le film a déjà reçu le Lion d’Or à la Mostra de Venise 2023 et deux distinctions aux Golden Globes 2024 (film et meilleure actrice pour Emma Stone dans la catégorie Film musical ou comédie.

Avec ces succès, le réalisateur a droit pour ses films à des distributions prestigieuses. On n’est pas en reste avec cette nouvelle production, mais cela n’est hélas pas être suffisant pour sauver le film.

Bella (Emma Stone) est une femme créée ou ramenée à la vie par un médecin farfelu ( Willem Dafoe) et promise au mariage avec l’assistant du docteur (Ramy Youssef). Elle s’enfuit avec un avocat (Mark Ruffalo) qui la séduit en lui promettant de découvrir le monde, et s’ensuit un parcours initiatique de Bella à travers le monde.

C’est une histoire du genre fantastique, un drame et un parcours initiatique. C’est en partie un remake de Frankenstein : un savant fou, une créature humaine, une ambiance 19e siècle, … mais sans la finesse du modèle. On pourra y voir aussi des traces de L’Île du Docteur Moreau, des ambiances visuelles déjantées type « La cité des enfants perdus » ou même « 20 000 lieues sous les mers ».

Il y a certes de la créativité dans les décors et ambiances, qui mélangent relents du passé, notes futuristes, et décors urbains (capitales Londres, Paris,…) très imagées.

Il y a Emma Stone (oscarisée pour La La Land), dans une performance pour le moins inhabituelle, de ce personnage de Bella dont on a longtemps du mal à comprendre à partir de quoi ce monstre est créé, et dans quel but. Dans une coquille enfantine au début, sa découverte du monde va la faire évoluer. Elle est d’abord froide et immature – comme le veut son personnage – et si au fil du temps elle évalue, elle ne convainc pas vraiment. L’émotion ne passe tout simplement pas, même si la « performance » est d’actrice est là.

Le savant fou, Willem Dafoe, est lui aussi un monstre, d’une nature apparemment différente car il affiche son vécu sur son visage lacéré de profondes cicatrices subies au nom de la science, qui tranche avec le visage lisse de Bella.

Et puis il y a Mark Ruffalo, l’avocat séducteur et tentateur, libidineux, qui offre une prestation burlesque et drôle. C’est lui ressort un peu du lot par son traitement généreux du rôle.

Pourtant, le résultat reste glacé et procure un malaise du fait de scènes glauques pleines de voyeurisme, parfois assez vulgaires. Elles n’apportent rien à l’histoire, la salissent tels des graffitis, elles font traîner l’histoire en longueur. Il y a presqu’une heure de trop au compteur de ce film. Après, certains diront que quand on n’aime pas, on compte… ici le temps qui ne s’écoule pas, on n’est pas loin du supplice à force d’attendre le dénouement libérateur.

Mais qu’est-ce qu’Emma Stone est venue faire dans cette galère, elle qui sait être si expressive et chaleureuse ? Évidemment, elle connaît bien Yórgos Lánthimos, elle a déjà été son héroïne dans La favorite, et puis il lui a forcément demandé de ne pas l’être, expressive et chaleureuse, pour les besoins de son rôle, mais le résultat est franchement douloureux à regarder. Le constat nous frappe du début à la fin : Emma n’est pas touchante, comme le film. La sauce ne prend pas, on ne la voit jamais comme un enfant dans un corps d’adulte (à ce titre, un modèle aurait été Valérie Lemercier à genoux dans la parodie de l’École des fans par Les Nuls.

Enfin, il y a les messages, que beaucoup verront comme féministes, d’émancipation de la femme, sujet traité de façon plus ou moins absconse mais qui semble vouloir véhiculer des messages forts de façon très prétentieuse. Le film se veut intello voire snob, il nous donne surtout un goût de kitch hypersaturé, écœurant.

Pauvres Créatures (titre original : Poor Things’) de Yórgos Lánthimos avec Emma Stone, Willem Dafoe, Mark Ruffalo, Ramy Youssef, durée 2h21.

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