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Consommation de pastèque : des bienfaits et des dangers pour la santé

Avec l’arrivée de la période estivale, il est utile de rappeler que ce fruit (?) indéniablement plein de bonnes choses et bon pour la santé cardiovasculaire est très riche en potassium, ce qui présente des dangers pour certaines personnes. Un point sur le sujet à base d’une étude de revue de la littérature scientifique et de rapports de cas médicaux

D’abord, s’agit-il vraiment d’un fruit ? Et bien non, malgré sa saveur sucrée ! La pastèque (Citrullus lanatus), parfois appelée melon d’eau, appartient à la famille des cucurbitacées, comme le melon, courgette, le concombre ou le potiron.

L’attrait diététique, les bienfaits pour la santé cardiovasculaire

La pastèque est très attractive du point de vue diététique, car très rafraîchissante, puisque gorgée d’eau qui représente 90 % de sa composition ; ses nutriments essentiels dont plusieurs acides aminés, son goût très doux auquel contribue des sucres, et la couleur de sa chaire rouge apportée par un pigment naturel de la famille des caroténoïdes, le lycopène. Le légume contient aussi plein de vitamines (B, C, D), des anti-oxydants, des minéraux et des oligo-éléments.

Des chercheurs ont effectué une revue des études précliniques et cliniques publiées entre 2000 et 2020 sur l’effet de la pastèque et/ou de L-citrulline (l’un des acides aminés qu’elle contient et considéré comme son composé « signature ») sur la santé cardiovasculaire. Selon les auteurs, il en ressort que des études cliniques ont montré qu’une supplémentation en pastèque et en L-citrulline permettait de réduire la pression artérielle. La consommation de pastèque aurait également un effet favorable sur le contrôle du poids, possiblement en agissant sur le mécanisme de la satiété. L’amélioration de l’homéostasie du glucose dans les modèles animaux de diabète induits par des produits chimiques et des régimes alimentaires a été prouvée, mais les données chez l’humain restent limitées.

D’autres domaines ont été étudiés de façon émergente, comme la santé du cerveau et celle de l’intestin. Dans ce dernier cas la consommation de pastèque améliorerait la fonction de la barrière intestinale et modifierait le microbiote, ce qui peut avoir un impact sur les fonctions physiologiques. Selon les auteurs, « les preuves s’accumulent en faveur d’une consommation régulière de pastèque pour la santé cardio-métabolique« . Il invitent à des recherches futures visant à déterminer la quantité et la fréquence de la consommation de pastèque et/ou citrulline en fonction de différentes types de populations.
Cela semble particulièrement avisé, et la seconde partie de notre article explique en quoi.

Études de cas : le potassium dans le viseur

La pastèque contient plus de 100 mg de potassium pour 100 g de légume. C’est une teneur élevée.
Ce minéral est très important dans l’organisme, il est notamment impliqué dans la régulation de la pression sanguine. Chez l’homme, La kaliémie (taux de potassium sanguin) est normale entre 3,6 et 5,5 mmol/litre. Ce sont les reins qui éliminent le potassium excédentaire qui passe dans l’urine, pour éviter une hyperkaliémie, soit un excès de potassium dans le sang, dont les signes sont en premier lieu des troubles du rythme cardiaque.
Avec ce tableau rapide, le décor est planté pour nous plonger dans la pratique médicale : deux études de cas publié dans la littérature par des médecins américains de l’hôpital Worcester dans le Massachusetts.

Le premier cas est un homme de 56 ans atteint de diabète de type 2 traité par insuline et d’hypertension artérielle traitée par lisinopril (inhibiteur de l’enzyme de conversion). Il souffre également d’une insuffisance rénale chronique avancée (stade 4). C’est en raison d’une syncope qui a duré 15 secondes qu’il se présente aux urgences. Son pouls est ralenti (bradycardie) avec seulement 20 battements par minute et il est en hypotension marquée (62/32 mmHg). À part une sécheresse des muqueuses, son examen clinique est normal. À l’ECG, on détecte une bradycardie sinusale mais également un bloc auriculo-ventriculaire de 1er degré. Il reçoit comme traitement atropine et noradrénaline. Les analyses de laboratoires révèlent un potassium à 7 mmol/l. Vous les savez puisque vous connaissez les valeurs normales : c’est une hyperkaliémie, qui sera traitée à l’hôpital ainsi qu’une une acidose métabolique et d’autres résultats hors des valeurs normales en lien avec ses pathologies. D’où vient cet excès de potassium ? Le patient finit par déclarer qu’il avait consommé de grandes quantités de pastèque tous les soirs pendant les 2 mois écoulés.
Le diagnostic a pu être posé : L’absorption en excès de potassium via la consommation excessive de pastèque, potentialisée par l’insuffisance rénale chronique (IRC) et le traitement par inhibiteur de l’enzyme de conversion, a entraîné l’hyperkaliémie sévère. Celle-ci a provoqué une bradycardie symptomatique avec syncope. Cela comme résultat de l’absorption du potassium en excès. L’IRC a joué un rôle déclencheur clé puisque l’on se souvient que le potassium est éliminé par les reins. Dans l’IRC, les reins fonctionnent moins bien et ne peuvent plus prendre en charge l’excès de potassium aussi efficacement.
Chacun devinera le conseil médical donné au patient : réduire sa consommation de pastèque à un niveau raisonnable. Le respect de cette mesure a permis de ne plus revoir d’hyperkaliémie chez ce patient.

Le second cas est celui d’une femme de 36 ans qui était également atteinte d’IRC, cette fois en phase terminale. Elle devait subir une hémodialyse, étant atteinte en outre d’une néphropathie auto-immune (maladie de Berger). Dans le cadre de la surveillance associée, les examens de laboratoire ont détecté une hyperkaliémie, sans symptômes associés. La kaliémie a ensuite augmenté pour atteindre 7,4 mmol/l, alors que la dialyse permettait un débit rénal normal. Le taux de dialyse a été augmenté, baissant un peu la kaliémie sans toutefois de retour à la normale. Pourtant, quelques semaines plus tôt sa kaliémie était normale. On a finalement identifié le problème : la patiente avait consommé quotidiennement de la pastèque en grosses quantités pendant les trois dernières semaines.

Les médecins concluent de tout cela que l’origine alimentaire (pastèque, melon,…) lors d’une situation d’hyperkaliémie doit toujours être gardée à l’esprit chez les personnes dont l’état de santé les rend sensibles à une modification de l’absorption du potassium. Les affections rénales chroniques sont des facteurs de risque importants à ce titre, car les patients ont des capacités réduites d’élimination du potassium excédentaire. Certains médicaments pour l’hypertension pris au long cours peuvent également augmenter le risque d’hyperkaliémie. Cette dernière peut-être déclenchée par la détérioration de la fonction rénale, la mauvaise observance des traitements médicamenteux, ou donc un apport externe de potassium. Trop de pastèque, dont la consommation peut passer inaperçue, peut réellement mettre la vie des patients atteints d’IRC en danger, rappellent en conclusion les médecins américains.

Recette pastèque estivale

Et pour terminer sur une note positive, un peu de Street Food asiatique : la crème glacée pure pastèque, préparation express à la main sur plaque de fer à – 30 degrés. À consommer avec modération, n’est-ce pas ?

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