GaléniqueIndustrie pharmaceutiqueLaboratoires pharmaceutiquesMédicamentsR&DScienceTechnologieVaccins

Une puce électronique dans un comprimé, ça existe depuis quelques années. Dans quel but ?

Sur les réseaux sociaux, on trouve des détournements complotistes de cette technologie commercialisée

En santé et dès lors qu’il est question de traitement médicamenteux, la prise correcte, selon les instructions posologiques de médicaments par le patient peut être essentiel pour la réussite de l’acte thérapeutique.

Observance thérapeutique

Cette notion de respect d’une thérapie est appelée « observance », en anglais « compliance ».

« Observer » ici, c’est dans le sens de se conformer aux règles de prise définies : respect du bon dosage, de la bonne fréquence de prise, des horaires de prise parfois, et de la durée du traitement.

Certaines pathologies et/ou certains médicaments sont sujets à faire de l’observance un véritable problème voire un défi. Dans cette catégorie, on trouve le cas de médicaments dans le domaine de la psychiatrie. Certaines catégories de patients devant prendre des médicaments présentent une observance faible, liée à leur maladie.
Or pour certaines maladies psychiatriques, ne pas prendre son médicament comme il faut où l’arrêter peut entraîner des risques graves. Par exemple, l’arrêt d’un antidépresseur peut entraîner des idées suicidaire et un passage à l’acte. Ce type de risque existe aussi pour certaines schizophrénies tandis que pour d’autres, le patient peut devenir dangereux pour les autres si son traitement est interrompu ou oublié.

La galénique à la rescousse

Cette science pharmaceutique est capitale dès qu’on parle de médicaments. La galénique, c’est la mise au point de la formule (on parle de « formulation ») du médicament : sa recette, le principe actif étant le plus souvent accompagnés d’excipients (produits non actifs) pour les mettre en forme de comprimés effervescents ou non, gélules, solutions, crème, etc.

La galénique, ça va très loin car on peut même par exemple mettre au point grâce à cette science des médicaments qui vont libérer le principe actif à où on le souhaite : exemple un comprimé « enrobé », qui comporte une couche externe qui résiste aux sucs gastriques afin de ne pas être éliminé trop tôt.

Formulations « retard »

On peut aussi mettre au point des formulations galéniques « à libération prolongée » : le médicament va être absorbée et diffusée dans l’organisme progressivement, pour agir ainsi de façon prolongée.

Pour les patients psychiatrique, c’est une solution très utilisée, car l’observance n’est souvent pas optimale quand on doit assurer que le patient avale des comprimés chaque jour.

Ainsi des formulations injectables « retard » ou « dépôt » sont commercialisés, permettant d’administrer le médicament par exemple une fois par mois, voire tous les 3 mois. Un sacré gain pour l’observance !

e-Galénique

Au XXIe siècle, on va forcément beaucoup plus loin avec l’embarquement de l’électronique dans le médicament – oui bien d’ailleurs et ce depuis le siècle dernier, l’embarquement du médicament dans l’électronique !

Mais revenons au cas du médicament qui contient une puce électronique.

Evidemment, cela ne peut qu’être source de tous les fantasmes complotistes liés au vaccin anti-Covid puisqu’il a très vite circulé l’idée que Bill Gates avait prévu de mettre une puce dans les doses.

De puce à puçage, le raccourci est vite fait :

Ici, Albert Bourla, le PDG de Pfizer, parle d’une technologie existante, autorisée et commercialisée depuis quelques années déjà. Il s’agit de l’intégration d’un IEM dans le comprimé de médicament.

Donc l’auteur de ce tweet et long thread complotiste fait de la désinformation pure.

Marqueur d’événement ingérable (IEM, Ingestible Event Marker) : l’exemple du premier « médicament connecté »

Important : Nous parlons de ce dispositif à titre d’illustration et parce que c’est le premier de ce genre commercialisé – sachez qu’il a obtenu sa mise sur le marché aux États-Unis en 2017. Le labo a déposé une demande d’AMM à l’Agence européenne du médicament, qu’elle a retiré le 24 juillet 2020, l’EMA estimant qu’il n’y avait pas suffisamment d’informations disponibles sur la qualité de fonctionnement du dispositif.

Mais notre sujet n’est pas ce médicament lui-même, mais la compréhension du dispositif.

Abilify est le nom de marque d’un médicament antipsychotique du laboratoire Otsuka (Japon) dont le principe actif est l’aripiprazole. Il est indiqué dans le traitement de la schizophrénie, de certains trouble bipolaires et des épisodes dépressifs majeurs, entre autres.
Abilify Mycite est un dispositif hybride, est une formulation dans laquelle a été intégré un capteur dans chaque comprimé d’Abilify. Ce capteur a la taille d’un grain de sable…

Une fois avalé, le comprimé à capteur intégré envoie un faible signal à un patch portable équipé Bluetooth appliqué sur le corps du patient.

Une application dédiée, téléchargeable sur smartphone, affiche les informations fournies par le dispositif Bluetooth (signaux reçus des capteurs dans les comprimés avalés).
L’application, destinée au patient, recueille également des entrées saisies par le patient s’il le souhaite comme l’indication de sa prise de comprimés, son humeur.

Sélection d’écran de l’app Mycite

Cela, c’est l’interface patient. Mais ce que l’on souhaite ce n’est pas juste un auto-contrôle par le patient, on peut souhaiter un contrôle à distance par un personnel médical ou infirmier en charge de surveiller l’observance du patient.

C’est pourquoi il existe un tableau de bord disponible sur le web, un portail en ligne dont l’accès peut être partagé, qui raconte l’observance du patient pour ses comprimés d’Abilify.
À tout moment, ce personnel de surveillance sait si des comprimés ont été avalés par le patient, et précisément quand pour chaque comprimé.

Tableau de bord de l’observance sur le web

Ainsi, on comprend bien que ce type de dispositif n’est pas un système pour « pucer » et suivre à la trace la personne qui a ingéré le médicament mais un système pour s’assurer de la prise du médicament.

Le capteur étant de la taille d’un grain de sable, cette information n’échappera certainement pas à nos lecteurs complotistes qui pourront continuer à extrapoler à l’infini.

Absence de conflit d’intérêt : Du fait de l’évocation d’un médicament précis, la Rédaction en profite pour préciser qu’aucun des membres n’a de lien de travail avec des fabricants de médicaments. Nous revendiquons néanmoins au sein de la rédaction l’expertise du domaine de la R&D pharmaceutique.

Source des données sur le site du dispositif.

Science infuse est un service de presse en ligne agréé (n° 0324 x 94873) piloté par Citizen4Science, association à but non lucratif d’information et de médiation scientifique doté d’une Rédaction avec journalistes professionnels. Nous défendons farouchement notre indépendance. Nous existons grâce à vous, lecteurs. Pour nous soutenir, faites un don ponctuel ou mensuel.

Propulsé par HelloAsso

ou via J’aime l’Info, partenaire de la presse en ligne indépendante

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Résoudre : *
26 − 4 =