ActualitésArtsCinémaComplotismeCritique cinématographiqueCultureÉcologieFrancePolitiqueSciences de l'information et de la communication

Cinéma : « Second tour » : les politique et les médias dézingués par Albert Dupontel

Le nouveau film du réalisateur et acteur le met à l’affiche avec Cécile de France. Une fable rocambolesque comme on s’y attend, au scénario poétique et kaléidoscopique qui traite un problème de fond : les ficelles du pouvoir et la démocratie en danger

Pierre-Henry Mercier (Albert Dupontel), candidat à l’élection présidentielle est en tête des sondages. Issu d’une riche famille d’industriels, il n’est pas du sérail politique. Une journaliste politique au placard (elle en est réduite aux commentaires footballistiques) va avoir l’opportunité de retrouver son sujet d’expertise, sollicitée pour suivre l’entre-deux tours. Il se trouve qu’elle a connu le favori dans sa jeunesse. Elle ne le reconnaît pas dans son discours et sa façon d’être, ce qui la motive pour mener une enquête. Flanquée d’un reporter d’images (Nicolas Marié), elle va nous faire vivre une aventure épique pour démasquer le politique.

Théorie du complot

C’est la campagne pour la présidentielle de Robert Kennedy en 1968 qui a inspiré Albert Dupontel pour ce film, et plus particulièrement le discours dans lequel il annonce la mort de Martin Luther King qu’il a trouvé étonnamment sincère parce qu’improvisé. Il a voulu bâtir alors une fiction avec un politique qui cacherait tout de ses intentions réelles. Certains diront que c’est ce qu’on peut appeler un scénario complotiste. Ou bien que c’en est une satire. Sous ses airs et discours particulièrement lisses en public, Pierre-Henry Mercier (dit PHM) nous cache effectivement un gros secret qu’on ne va pas dévoiler ici mais qui est la base d’un rebondissement essentiel du film. Le duo de journalistes va démêler tout cela en toute cocasserie. Alors, vrai ou fake ? On est un peu perdu, mais c’est le but. D’ailleurs, Albert Dupontel se vante d’avoir largement utilisé des modes de fabrication à base de « fake » pour son film, qu’il s’agisse d’effets spéciaux (par exemple pour faire croire à une foule lors des discours) ou le recours à ChatGPT pour la traduction de la séquence en grec ancien.

Qui tire les ficelles ? Car c’est le questionnement du film avec une triste leçon : pour parvenir à être aux commandes, il faut user de subterfuges et en politique le mieux est de trouver une « marionnette » apte à manipuler les foules. Les beaux discours et les belles intentions sont vendeuses, on les utilise en mode populisme.

L’écologie, en mode argument ou combat politisé au lieu d’une cause désintérée prend à ce titre de sacrés coups. Car l’écologie est-elle de droite ou de gauche ? Dans ce site d’actualité, on pointe souvent l’instrumentalisation politique de la science, on est ici en plein dans le débat.

Kaléidoscope de situations loufoques et d’imbrications de vies

Il y a l’histoire, pleine de morceaux de vie du présent qui entrent en collision avec ceux du passé. Albert Dupontel use plusieurs fois de la technique du flash-back pour nous faire comprendre les réminiscences de la journaliste qui a connu le politicien autrefois, ou bien pour nous faire découvrir des morceaux de l’histoire familiale aux pans secrets du politicien. Sa vie que l’on nous dévoile au rythme trépidant de l’enquête est à la fois lancinante et rafraîchissante, souvent grotesque au moyen de discours et situations décalés.


Les Jeux de lumières, qui vont d’atmosphères artificielles et hermétiques (plateaux TV, salles confinées où PHM fait ses discours) tantôt crues et radicales, tantôt en clair-obscur et bucoliques à la campagne, en passant par le mielleux dans les scènes de dialogues ou de confrontation clés ; les plans variés en mouvement permanent dans toutes les dimensions ; le rythme effréné de l’enquête de Mlle Pove (la journaliste), les interventions comiques de son preneur de son et lumière, les vies dévoilées et le rebondissement improbable. Tout cela est comme un gros coffre à énigmes qui déboussole. On peut avoir l’impression que cela part dans tous les sens mais il y a de la logique et un dessein.

Dupontel, on aime ou on aime pas, parce qu’il est très transgressif et ne craint pas la loufoquerie. Cela peut gêner. Ce film est en apparence moins caustique que les autres, plus alambiqué, il peut même paraître mièvre dans certaines scènes. Certains trouveront ce pêle-mêle indigeste, d’autres apprécieront ces effets voulus qui au final s’avèrent poétiques et suscitent la réflexion, avec un arrière-goût de doux-amer.

Second tour, un film de Albert Dupontel, avec Albert Dupontel, Cécile de France, Nicolas Marié – Date de sortie : 1er novembre 2023 – Durée : 1h35

Cet article GRATUIT de journalisme indépendant à but non lucratif vous a intéressé ? Il a pour autant un coût ! Celui de journalistes professionnels rémunérés, celui de notre site internet et d’autres nécessaire au fonctionnement de la structure. Qui paie ? nos lecteurs pour garantir notre ultra-indépendance. Votre soutien est indispensable.

Science infuse est un service de presse en ligne agréé (n° 0324 x 94873) piloté par Citizen4Science, association à but non lucratif d’information et de médiation scientifique.

Notre média dépend entièrement de ses lecteur pour continuer à informer, analyser, avec un angle souvent différent car farouchement indépendant. Pour nous soutenir, et soutenir la presse indépendante et sa pluralité, faites un don pour que notre section presse reste d’accès gratuit, et abonnez-vous à la newsletter gratuite également !

ou via J’aime l’Info, partenaire de la presse en ligne indépendante

Abonnez-vous à la Newsletter de Science infuse !

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Résoudre : *
12 ⁄ 2 =