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Éditorial – 8/12/2023

La gestion des risques, une science attaquée sous couvert de discrimination

Cette semaine, un article du journal Le Monde s’indignait, sur la base d’une « investigation numérique » copubliée avec LightHouse Report, de la discrimination opérée par la CAF pour détecter les erreurs d’attribution d’allocations familiales. Ici, la CNAF (Caisse nationale d’allocations familiales) est visée, plus précisément accusée de cibler certains groupes de population parmi ses allocataires pour effectuer des contrôles. Pourtant, ce rapport, que nous avons lu, évoque bien dès son introduction le principe : l’évaluation prédictive des risques. Et oui, quitte à faire des contrôles à la recherche d’erreurs, autant se focaliser prioritairement vers les groupes que l’on sait plus susceptibles d’être concernées par des erreurs, qui comprennent également des fraudes. Mais pour Le Monde, c’est sacrilège. Ce que l’on comprend, c’est qu’il ne faut surtout pas remettre en cause des erreurs d’allocations pour des populations vulnérables, en tout cas ne pas les cibler pour les contrôles. Parce que c’est discriminatoire. Ainsi, l’algorithme de la CNAF qui catégorise les allocataires et permet de mieux cibler les contrôles serait une hérésie.

L’algorithme de la CNAF récupéré par les enquêteurs procède d’un système de gestion des risques, les allocataires étant affectés, selon la nature de leur situation d’un facteur de risque, générant un score de risque qui, s’il est élevé, va être plus propice à des contrôles. Ce sont des modèles d’affectation de risques, un fonctionnement standard pour tout sujet qui nécessite un traitement des risques (ici les erreurs et la fraude).

Le Monde nous révèle ainsi avec une indignation non contenue que les personnes en situation les plus précaires sont les plus à risque d’erreurs et de fraude. C’est factuel. Dans ces populations, on trouve par exemple le fait d’avoir des enfants mineurs, être allocataire au titre d’une invalidité, être divorcé ou veuf, avoir des ressources faibles. Mais là vient le problème : on contrôle plus ces groupes d’allocataires. C’est donc justifié pour détecter plus efficacement la fraude.

On s’indigne de cette étiquette posée sur les groupes à risques d’erreurs et de fraude. Pourtant, cela traduit une réalité. Cachez cette réalité que je ne saurais voir ? N’est-ce pas obscurantiste ? La discrimination a bon dos. D’autant que la CNAF ne fait pas publicité de son système de gestion des risques. Qui stigmatise, dès lors ?

Dans la même veine, on peut parler de recherche médicale. Certains s’indignent d’une façon similaire invoquant discrimination, quand on fait de la recherche clinique auprès de patients au cours de laquelle on collecte des données sur les origines ethniques des participants. C’est éminemment discriminatoire, s’indigne-t-on, effaré. Or certaines populations, pour des raisons génétiques, ne réagissent pas de la même façon aux médicaments. Certains groupes ethniques éliminent plus ou moins rapidement tel ou tel médicament, à tel point que les recommandations posologiques doivent être adaptées. C’est discriminatoire, crieront certains. À ce titre ils demandent à ce que l’on ne collecte plus ces données d’origine ethnique. Vont-ils aussi demander à ce que l’on modifie les modes d’emploi afin de publier des schémas posologiques identiques pour tous quel que soit le médicament ? Parce que c’est discriminant ces distinctions. On est aussi là dans la gestion des risques médicaux et pharmaceutiques.

L’obscurantisme est bien en marche, confrontée à l’idéologie.

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