Vaccin thérapeutique à base d’ARNm: une étude clinique dans le cancer du poumon a démarré cet été
C’est la nouvelle génération de vaccins, non plus pour prévenir une maladie mais pour la guérir ; la technologie ARNm qui a connu son essor pendant la pandémie de Covid-19 suscite beaucoup d’espoirs thérapeutiques notamment dans la guérison tant espérée du cancer
Il s’agit d’une étude clinique multicentrique internationale, ce qui signifie qu’elle est menée dans plusieurs centres de recherche (des hôpitaux) dans plusieurs payés. Elle vise à évaluer un vaccin expérimental à base d’ARN messager (ARNm) administré pour la première fois à l’humain, mis au point par BioNTech, l’entreprise de biotechnologie allemande qui a développé en 2020 et en un temps record le vaccin leader contre le Covid-19 avec le laboratoire pharmaceutique américain Pfizer. La pathologie visée est le redoutable cancer du poumon le plus fréquent et qui tue le plus à travers le monde, appelé cancer bronchique non à petites cellules (CBNPC).
Vaccin d’immunothérapie ciblée
Le vaccin expérimental a pour nom de code BNT116. Il utilise de l’ARNm qui sert à présenter aux système immunitaire du patient des marqueurs tumoraux courants présents en cas de CBNPC, afin de l’aider à identifier et lutter contre les cellules cancéreuses qui expriment tout particulièrement ces marqueurs. Cette conception apporte un avantage certain par rapport aux traitements traditionnels du cancer comme la chimiothérapie, qui agissent sur toutes les cellules, cancéreuses et saines, entraînant un niveau de toxicité générale problématique.
Cancer du poumon à différents stades
Le vaccin est spécialement conçu pour le cancer bronchique non à petites cellules. Les patients volontaires sont sélectionnés s’ils ont reçu ce diagnostic. Le stade de la maladie n’est pas un critère, bien au contraire les chercheurs souhaitent des participants à tous les stades de la maladie. Dans le cancer, on définit quatre stades d’évolution, du stade 1 (stade précoce) au stade 4 (stade avancé), en passant par les stades intermédiaires 2 et 3, généralement avant radiothérapie et/ou chirurgie de résection.
Évaluation de la sécurité d’emploi
Dans un tel essai au stade d’évaluation précoce, la recherche est toujours axée avant tout sur l’absence d’effets indésirables problématiques. L’étude multicentrique a donc principalement pour but de savoir si le vaccin expérimental est sûr et bien toléré par les patients participants. Dans le cadre de cette évaluation du profil de sécurité d’emploi, on déterminera également la dose de vaccin la plus sûre pour les patients. Cela sera fait soit en donnant le vaccin expérimental seul, soit en association avec des traitements dit « standard », c’est-à-dire les traitements habituels de chimiothérapie ou d’immunothérapie.
Les participants recevront plusieurs doses du vaccin expérimental sur une période d’environ un an.
Évaluation de l’efficacité
L’effet du médicament expérimental BNT116 sur le cancer sera évalué, c’est-à-dire son action antitumorale, soit seul soit avec les traitements standard, dans l’espoir d’une action synergique. Bien évidemment, ces effets thérapeutiques éventuels seront analysés, et comme pour toute évaluation de médicament, on évaluera cette efficacité au regard de l’efficacité pour déterminer si ce rapport est favorable, et décider si le développement du médicament mérite d’être poursuivi.
Objectif de 130 patients volontaires, le premier est anglais
À ce stade précoce de développement clinique (dite phase 1), on se limite à un nombre relativement réduit de patients, soit ici 130 répartis dans 34 centres au Royaume-Uni, Allemagne, Espagne, Hongrie, Pologne, Turquie et États-Unis). Les centres de recherche biomédicale sont, on s’en doute, constitués dans des hôpitaux, le plus souvent des établissements hospitalo-universitaires. Pour cette étude, le centre leader de l’étude est à Londres ; c’est celui de l’University College London Hospitals (UCLH). Le 23 juillet dernier y a été inclus le premier patient de l’étude, Janusz Racz, un Londonien âgé de 67 ans, informaticien qui travaille dans le domaine de l’intelligence artificielle.
Consentement éclairé des participants
Il a déclaré, à l’occasion d’article de l’UCLH sur l’étude : « Le Dr Sarah (Benafif) [oncologue médical en charge de l’administration du vaccin expérimental à l’UCLH, NDLR] m’a expliqué comment le vaccin devait fonctionner et en quoi il était différent du traitement que j’avais récemment suivi. L’espoir était qu’il empêcherait le cancer de réapparaître.
J’ai réfléchi et j’ai décidé de participer parce que j’espère que le vaccin me protégera contre les cellules cancéreuses. Mais j’ai également pensé que ma participation à cette recherche pourrait aider d’autres personnes à l’avenir et contribuer à ce que ce traitement soit plus largement disponible.
En tant que scientifique, je sais que la science ne peut progresser que si les gens acceptent de participer à des programmes comme celui-ci. Je travaille dans le domaine de l’intelligence artificielle et je suis ouvert à la nouveauté. Ma famille a également fait des recherches sur l’essai et m’a encouragé à y participer. »
Voilà qui résume bien les objectifs de l’étude que doivent impérativement connaître les participants, ainsi que les bénéfices et risques potentiels, dans un acte qui est altruiste : le vaccin expérimental pourrait ne pas être bénéfique pour les patients individuels, mais feront progresser la recherche et les traitements médicaux futurs.
Illustration : Radiographie thoracique montrant cancer du poumon (taches blanches) – Source Wikipédia
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