Réseau social X (ex Twitter) : bataille judiciaire en vue entre Elon Musk et la Commission européenne
Le patron de la plateforme a immédiatement réagi à un communiqué de l’instance de la CEE énumérant des reproches à la plateforme qui selon elle, serait constitutifq d’une violation des dispositions du Digital Service Act (DSA)
Les tensions entre le milliardaire américain propriétaire de Twitter rebaptisé X et la Commission européenne n’est pas nouvelle. En octobre 2023, elle l’avait sommée d’agir contre la désinformation sur le réseau social, plus particulièrement en lien avec les actes terroristes du Hamas. Thierry Breton, commissaire européen lui avait envoyé une lettre très directive comportant un ultimatum. En référence, il y avait le nouveau DSA, s’en était suivi un échange musclé entre M. Breton et Elon Musk. Aujourd’hui, nouveau bras de fer avec les mêmes protagonistes, le même référentiel et un nouvelle série de reproches qui pourrait conduire, si les faits sont avérés, à des sanctions.
Communiqué et griefs
Le communiqué de la Commission européenne (CE) a été publié hier 12 juillet, avec le titre « La Commission adresse des constatations préliminaires à X pour violation de la législation sur les services numériques ». Elle indique avoir informé X de son avis préliminaire selon lequel X « enfreint la législation au titre du DSA truquées, à la transparence de la publicité et à l’accès aux données pour les chercheurs« . La CE explique se baser sur une enquête approfondie à base de consultation d’experts, de coordinateurs nationaux du DSA dans les États membres et de documents internes à X.
Les comptes « vérifiés » seraient trompeurs
Il s’agit des comptes disposant d’un signe distinctif, une coche bleue. Il signalent les comptes abonnés payants à X. La CE considère que son utilisation est faite par X « d’une manière qui d’une manière qui ne correspond pas à la pratique du secteur et induit en erreur les utilisateurs. Étant donné que toute personne peut s’abonner pour obtenir un tel statut «vérifié», cela a une incidence négative sur la capacité des utilisateurs à prendre des décisions libres et éclairées concernant l’authenticité des comptes et le contenu avec lesquels ils interagissent.«
Ce grief peut laisser dubitatif sur sa pertinence. En effet, Elon Musk a changé la règle sur les comptes bleus assez rapidement après son arrivée à la tête de la plateforme, invoquant une attribution par Twitter sous forme d’évaluation de la « notoriété » des comptes, de façon totalement opaque. Elon Musk dénonçait alors un système injuste distinguant sur des critères nébuleux seuls connus de Twitter le signe distinctif, à vie, rappelant que d’une part la notoriété n’était pas gage de qualité des publications des comptes ainsi « certifiés », mais en plus créait une dichotomie malsaine et une injustice entre les citoyens lambda et des privilégiés adoubés par la plateforme. On évoquait cela en février 2023 dans ces colonnes avec le changement de paradigme vers l’abonnement de cette coche bleue et le « drama » généra sur la plateforme.
Toujours est-il que la « pratique du secteur », soit les usages courants ou anciens de telle ou telle plateforme n’a pas à être imposée par la Commission européenne, à moins de vouloir aller beaucoup plus loin que le DSA. L’argument au titre de ce DSA serait que les utilisateurs de X sont « induits en erreur », ce qui n’est pas le cas, les règles Twitter nouvelles étant été l’objet d’explications détaillées du pourquoi et du comment, et le règlement Twitter est explicite sur ce que sont ces coches bleues. En outre, les comptes qui s’abonnent sont bien vérifiés lors du process d’abonnement avec la fourniture obligatoire d’une copie de pièce d’identité.
X ne respecterait pas la transparence requise en matière de publicité
Ce grief repose sur l’absence de fourniture de « registre publicitaire fiable et consultable » par X. Allant plus loin, la CE considère que la plateforme « met en place des caractéristiques de conception et des barrières d’accès qui le rendent impropre à son objectif de transparence à l’égard des utilisateurs ». L’instance européenne reproche en outre à X de n’avoir en place aucune surveillance et gestion des risques émergents liés à la publicité en ligne.
X bloquerait l’accès des chercheurs aux données publiques de la plateforme
« En particulier, X interdit aux chercheurs éligibles d’ accéder de manière indépendante à ses données publiques« , affirme la CE, et que le processus de la plateforme pour permettre l’accès à son interface de programmation d’applications (API) est dissuasif pour les chercheurs, sauf à devoir payer « des honoraires disproportionnés« .
Commentaires de Thierry Breton et réaction d’Elon Musk
Suite au communiqué de la CE, Thierry Breton est allé plus loin avec une publication Twitter, affirmant : « À l’époque, les #BlueChecks (NDLR : comptes certifiées à coche bleue) étaient synonymes de sources d’information dignes de confiance.
Ce post va au-delà du communiqué, qui s’en tient à un soi-disant caractère déceptif et trompeur de la coche bleue des comptes abonnés. Car de fait, avoir de la « notoriété » n’est pas synonyme de véracité ou de source de confiance, et fort heureusement, sauf à sombrer dans le populisme.
La réaction ironique d’Elon Musk à ce post ne se fait pas attendre : « Comment savoir si vous êtes réel ? «
Elon Musk a également déclaré sur X : « Nous attendons avec impatience une bataille publique devant les tribunaux, afin que les citoyens européens puissent connaître la vérité »;
Pour aller plus loin, Elon Musk a confirmé une information d’une source d’information américaine révélant que « la Commission européenne voulait que X engage une équipe de personnes dans l’UE qui superviserait unilatéralement la suppression des « fausses informations » sur la plateforme, nous a dit une source ayant connaissance du dossier« .
Prochaines étapes
La Commission européenne rappelle qu’il s’agit ici des conclusions de son enquête préliminaire, et que c’est désormais à X de se défendre des griefs portés à son encontre, avec une réponse écrite. Elle précise qu’en cas de confirmation de son avis, , X s’expose à des amendes pouvant aller « jusqu’à 6 % de son chiffre d’affaires annuel mondial total » et devra prendre des mesures de remédiation.
Une affaire à suivre
Image d’en-tête : dessin de presse Andrea
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