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‘Le voyage d’Alice en Suisse’ de Lukas Bärfuss, au théâtre de Belleville

Tout est déjà présent sur scène, dès le début : les six protagonistes du drame qui va se dérouler, le musicien et les grands Kakemonos tombant des cintres et qui disent la nature, la mer, le ciel, les rochers et les arbres, le monde, le monde tout entier que notre condition d’humains périssables nous condamne à perdre un jour.

Les six, c’est Alice, toute jeune encore mais à qui la vie ne laisse déjà plus de solution et qui a décidé d’entreprendre son « voyage en Suisse » ; c’est Lotte, la mère, qui n’accepte pas que sa fille renonce à cette vie qu’elle lui a donnée ; c’est Gustav Strom, le médecin euthanasiste, qui tient à affirmer, contre vents judiciaires et marées légales, qu’appliquer le serment d’Hippocrate peut consister aussi à faciliter la mort lorsque la vie n’est plus possible ; c’est Walter, le propriétaire des lieux où se déroule l’ultime séjour, et qui s’indigne des pratiques au nom des habitudes et de la respectabilité ; c’est John, le patient anglais en fin de vie, condamné à court terme mais qui ne parvient pas à prendre sa décision ; c’est Eva, l’assistante de Strom, et qui s’inquiète du respect absolu du protocole et de l’objectivité des participants.

Tout est déjà présent sur scène, dès le début, comme si tout nous était d’emblée donné pour se faire une idée et se faire à l’idée : celle de l’euthanasie, du suicide assisté, de la fin de vie sous contrôle médical.

Ce très beau texte de Lukas Bärfuss possède l’élégance rare et l’acuité ultime de poser des questions sans forcément apporter de réponses : en quoi consiste la décision de fin de vie ? Comment la faire accepter à ses proches ? Comment s’y préparer ? Quelles dispositions concrètes faut-il envisager ? Comment se déroule le séjour ? A quelles responsabilités sont confrontés les accompagnateurs du milieu médical ? Que dit précisément la loi ? Comment gérer les suites du séjour ?

Grâce à ce texte fort, grâce à la mise en scène précise et simple de Stéphanie Dussine, grâce aux jeux des acteurs, tous très convaincants et justes, grâce aussi à la superbe composition musicale de Charles Saint Dizier exécutée en live sur scène (trombone, synthétiseur et looper), le spectacle s’avère une saine réflexion menée sans mièvreries ni concessions.

Du 1er au 30 septembre 2025

Lundi 19h, mardi 21h15, dimanche 17h

Texte Le voyage d’Alice en Suisse, Scènes de la vie de l’euthanasiste Gustav Strom 
Auteur Lukas Bärfuss
Mise en scène Stéphanie Dussine
Traduction Hélène Mauler et René Zahnd / L’Arche, 2011
Collaboration artistique Nathalie Moreau 
Scénographie Margaux Maeght 
Création lumière Adrien Ribat 
Musicien Charles Saint-Dizier

Avec Brigitte Aubry, Nicolas Buchoux, Anne-Laure Denoyel, Stéphanie Dussine, Olivier Hamel, Sébastien Ventura

Théâtre de Belleville, 16 passage Piver, 75011 Paris

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