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Démence : les 14 facteurs de risque à connaître pour l’éviter ou la retarder

Une commission dédiée de la revue médicale prestigieuse The Lancet a mis à jour sa liste, y ajoutant deux nouveaux facteurs de risque dont découle un calcul surprenant. Synthèse et analyse critique

Le journal scientifique prestigieux The Lancet dispose de commissions de réflexion thématiques. Parmi elles, celle qui s’intéresse à la prévention intensive des démences comporte 27 experts. Cette initiative basée sur la revue de la littérature scientifiques est financée par l’University College London , l’Alzheimer Society, l’Azheimer’s Research UK et l’Economic and Social Rseach Council au Royaume-Uni Elle identifie notamment ses facteurs de risque, afin d’aider à prévenir la maladie, ou du moins de retarder son évolution. En 2020, les facteurs de risque identifiés étaient au nombre de 12. La dernière mise à jour passe à 14, et autant d’éléments d’attention à prendre en compte.

Pour rappel, la démence, qui selon l’OMS touche plus de 55 millions et se place à la 7e place des causes de mortalité dans le monde, est un terme qui recouvre plusieurs pathologies du cerveau, dans un processus dégénératif. Les personnes âgées sont les principales concernées. La maladie d’Alzheimer est la démence la plus fréquente, l’OMS estime qu’elle représente 60 à 70 % des cas.

Près de la moitié des cas de démence pourraient être évitées ou retardées selon le rapport

C’est bien là l’enjeu étudié par la Commission du Lancet, qui s’appuie sur l’analyse de la littérature scientifique. Ainsi, selon elle, chaque facteur de risque identifié amène à définir des mesures de vie adaptées visant à éliminer ces facteurs de risque. Si elles sont suivies, alors la maladie peut être prévenue ou retardée. Il s’agit ici du troisième rapport en la matière de la Commission qui vient d’être publié.

12 + 2 facteurs de risque… pour un drôle de calcul

Dans son dernier rapport en 2020, la Commission avait identifié 12 facteurs de risque de démence : un niveau d’éducation faible, la perte d’audition, l’hypertension artérielle, le tabagisme, l’obésité, la dépression, la sédentarité, le diabète, une consommation excessive d’alcool, un traumatisme crânien, la pollution atmosphérique et l’ isolement social.

Le rapport 2024 ajoute deux nouveaux facteurs de risque : un taux élevé de cholestérol LDL à compter de 40 ans environ, et une perte de vision non traitée. Ces deux événements réalisés seraient respectivement responsables de 7 % et 2 % des cas de démence.

En cumulatif, les 14 facteurs de risque seraient à l’origine de 40 % des cas de démence, concluent les experts.

Selon le rapport de la Commission également, les facteurs de risques conduisant à la plus forte proportion de démences sont un taux élevé de cholestérol et une déficience auditive (7 % des cas chacun), et un niveau d’éducation faible et un isolement social au stade tardif dans la vie (5 % des cas chacun).


Limitations

Tout d’abord, ces deux « nouveaux » risques ne sont en fait pas une nouveauté. Pour preuve, en 2019, l’OMS citait précisément un cholestérol élevé comme facteur de risque en préconisant le « contrôle adéquat » de son taux comme mesure préventive, et l’usage de médicaments hypolipémiants.
Pour ce qui concerne la vision, comme le montre la littérature étudiée par les experts que nous avons nous-même passée en revue, s’ils ont identifié et sélectionne de nouvelles études publiées de 2019 à 2022, l’une des références date de 2010 : « Untreated poor vision: a contributing factor to late-life dementia » parue dans l’American Journal of Epidemiology.

Ensuite, l’addition pure et simple des pourcentages de cas générés par un facteur de risque, pour aboutir à 45 % de risque de démence évitable en supprimant tous les facteurs de risque, laisse perplexe. On ne peut pas procéder ainsi car beaucoup de ces facteurs de risque sont corrélés entre eux et peuvent, par exemple, avoir des impacts synergistiques du fait de leur coexistence. Leurs interactions existent, et sont complexe. procéder à cette addition de façon linéaire est par principe un calcul discutable.
En outre, le total de 45 % est totalement théorique, car il n’est pas réaliste d’envisager la suppression de l’ensemble de ces 14 facteurs de risque. Cela donne néanmoins un potentiel et montre qu’il existe de multiples leviers d’action pour un résultat significatif en termes de réduction d’impact de la démence.

Recommandations d’évitement des risques

L’enjeu est bien d’éviter ou réduire la réalisation de ces risques et en particulier ceux qui conduisent aux cas de démence les plus nombreux. La Commission de The Lancet préconise donc à cet effet : assurer une bonne éducation pour tous les enfants, la pratique d’activités intellectuelles en milieu de vie, la réduction de l’exposition aux bruits nocifs (niveaux sonores) et le dépistage et le traitement des affections suivantes : perte auditive, la correction passant par l’utilisation de prothèses auditives, taux élevé de cholestérol LDL, déficience visuelle, et pour la dépression : des traitements efficaces. Le port d’une protection de la tête est recommandé lors de la pratique de sports de contact et du vélo et autres engins de déplacement personnel sans habitacle. Pour éviter l’isolement social, des logements avec un bon environnement communautaire sont recommandés pour maintenir une vie sociale. La réduction de la pollution atmosphérique est également dans les objectifs avec des mesures strictes pour son contrôle. Le tabagisme est dans le collimateur, la commission recommandant des mesures de lutte via le prix de vente des cigarettes et le relèvement de l’âge minimum pour en acheter. Les mesures hygiéno-diététiques sont évidemment présentes pour éviter des maladies (hypertension, diabète), par réduction du sucre et du sel dans l’alimentation.

Voilà un tableau particulièrement utile, car tous ces facteurs de risques sont modifiables par des actions adaptés. Elles sont d’ordre très différents, permettant de pointer qui peut agir sur eux : au niveau individuel, les recommandations hygiéno-diététique et comportementales sont à la portée de chacun. D’autres relèvent des soignants et aidants, et enfin certains des gouvernants (politiques de santé, sociale, environnementale,…).
Au final, des plans d’actions sont possibles par tous les acteurs, chacun à son niveau, pour agir sur la prévention de la démence.

Image d’en-tête : Illustration Andrea pour Science infuse

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