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Marie-Paule Belle, Rebelle & Barbara : nos deux soirées uniques au Théâtre de Passy

En juin, nous avons choisi Belle, puis re-Belle, c’était les 10 et 15 juin. Pourquoi se priver de rebelote, l’occasion nous ayant été offerte de prolonger des instants précieux hors du temps au Théâtre de Passy ? L’endroit est un écrin intimiste de 150 places où chaque note, chaque sourire ou clin d’œil de Marie-Paule Belle semblait nous être destiné. La salle, comble à chacune des soirée, a vibré d’une énergie unique, réunissant un public d’une diversité rare : des fans de la première heure, comme nous qui découvrions La Parisienne à 10 ans en 1976, nous faisant rechercher les accords de la chanson pour s’accompagner en la chantonnant plutôt que de travailler nos morceaux imposés par la prof de piano. Des plus âgés aussi, et des plus jeunes, couvrant un demi-siècle d’admirateurs. Marie-Paule Belle nous a éblouis par sa pétillance, son humour facétieux et une vitalité qui défie le temps. Ce récital a été un tourbillon de rires, de nostalgie et d’émotion pure, mêlant ses chansons et celles de Barbara. Dans l’atmosphère feutrée du Théâtre de Passy, la proximité avec l’artiste est saisissante, transformant chaque note au piano, chaque éclat de rire en une confidence partagée. Quand on sait qu’en parallèle, elle a mis en vente son magnifique piano à queue Steinway & Sons, fidèle compagnon de décennies de compositions, cela rajoute à l’émotion. Super professionnelle, consciencieuse, Marie-Paule enchaîne les chansons à un rythme soutenu, s’aidant d’une tablette posée sur le pupitre du piano pour naviguer entre ses compositions et celles de Barbara. Avec un respect profond, elle annonce chaque titre de la Grande Dame, comme une invitation à partager son admiration. Son interprétation de Barbara, naturelle et personnelle, est une clé du succès : jamais elle ne se fourvoie dans l’imitation, offrant des versions vibrantes qui honorent l’original tout en portant sa patte unique. Marie-Paule, facétieuse et drôle, double son jeu de piano d’un jeu de comédienne, comme sur J’ai les clés. Ce titre, dont le texte n’a pas pris une ride en évoquant les rencontres arrangées – des agences matrimoniales d’antan aux applications en ligne d’aujourd’hui – devient une performance théâtrale, déclenchant les rires du public conquis par son interprétation plus que narrative. Il en est de même pour Wolfgang et moi, et d’autres encore. Si nous avons regretté l’absence de l’ultra nostalgique Berlin des années 20, le final du 15 juin nous a comblés. Après un Dis, quand reviendras-tu ? bouleversant que les spectateurs chantent avec elle comme pour lui renvoyer la question tablant déjà sur un nouveau rendez-vous, elle revient pour un rappel explosif sur l’incontournable La Parisienne. Le public, en transe, frappe des mains pour suivre le rythme tonique, et la salle explose d’une joie communicative, ramenant notre cœur d’enfant au-devant de la scène.
Depuis ses débuts dans les cabarets comme L’Écluse, Marie-Paule Belle a marqué la chanson française. Née en 1946 à Pont-Sainte-Maxence, elle s’installe à Paris en 1969 après une victoire au concours Chapeau de Télé Monte-Carlo. Son premier 33 tours, récompensé par le prix Charles Cros en 1973, et des titres comme La Parisienne l’ont propulsée au sommet, portée par les textes de son ami d’enfance Michel Grisolia et de la romancière Françoise Mallet-Joris, sa compagne des années 70. Elle a toujours mis en avant ses paroliers en évoquant sa chance de pouvoir appuyer sa musique sur leurs textes. Lors d’une de ses premières télés, peut-être bien chez Philippe Bouvard, elle confiait avec autodérision qu’elle mesurait d’autant sa chance que la qualité de sa propre écriture de paroles était plus que médiocre. Pourtant, ses derniers albums et en particulier Un soir entre mille (2023) prouvent le contraire. En piano-voix, ils dévoilent des textes intimes signés de sa plume, autobiographiques ou universels. Au Théâtre de Passy, ces moreaux récents ont brillé, comme Il écoutait le cœur des gens en hommage à son père, entre autres. Mais nous en voulions davantage ! L’album Un soir entre mille méritait une place encore plus centrale dans la setlist. Un autre regret plus lointain teinte notre admiration : la collaboration trop brève avec William Sheller. Dans les années 70, il a arrangé quelques chansons de Marie-Paule. Les orchestrations typiques mêlant pop et accents classiques transcendent des chanson à texte vers une grande modernité qui magnifient la voix et le piano de Belle. Cette alchimie aurait pu idéalement se prolonger, mais l’important est que celle qui existe entre Marie-Paule Belle et son public n’a jamais failli. Merci à elle et au théâtre de Passy qui la reçoit régulièrement, et vivement les prochains récitals.

Image en tête : Marie-Paule Belle – Album et CD ‘Un soir entre mille » (2023)

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