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Déserts médicaux : une proposition de loi adoptée par le Sénat pour faciliter l’accès aux pharmacies en milieu rural

On associe principalement les déserts médicaux aux médecins, or 25 pharmacies ferment chaque mois en France. Les zones à faible densité démographique sont les plus touchées, le projet de loi de la sénatrice Maryse Carrère est passé

La tendance est générale, puisque 4 000 officines de pharmacie ont disparu entre 2007 et 2023, passant sous la barre des 20 000 officines. La dynamique est celle d’une accélération avec 236 fermetures de pharmacies rien qu’en 2023. Le problème est surtout marqué dans les campagnes et petites communes, contrastant avec les grandes villes surdotées. La conséquence n’est pas anodine pour la population affectée estimée à près de 5 %, contraintes de faire parfois des dizaines de kilomètres pour aller chercher des médicaments. Selon le rapport de Guylène Pantel, sénatrice RDSE de la Lozère, c’est surtout le nord-ouest de la France qui est le plus touché par le manque de pharmacie, y compris l’Ile de France.

Professionnel de proximité, primo-accès aux soins

Le pharmacien est un maillon essentiel de la chaîne de soins, en tant que professionnel de proximité établi dans son officine directement ouverte au public. La politique de réforme du système de soins vise notamment à abolir le goulot d’étrangement que représentent les médecins. Il a été maintenu trop longtemps par la force d’un corporatisme médical puissant, lobby très actif au niveau du parlement qui défend envers et contre tout des privilèges de plus en plus décalés avec les besoins de santé publique, Dans le cadre de cette réforme, les pharmaciens d’officine se voient transférés nombre d’actes médicaux qui vont du dépistage au diagnostic en passant par la vaccination et le suivi médical de pathologies chroniques, ainsi que de la prescription de médicaments à titre initial (exemple, antibiotiques pour certaines infections) ou en renouvellement d’ordonnances. Son champ d’action médical ne va faire qu’augmenter dans le futur.
Ainsi, le médecin va perdre son monopole d’actes médicaux, mais en restera le coordinateur. Gageons que pharmaciens perdront aussi le monopole de la dispensation de certains médicaments, notamment ceux vendus sans ordonnance. C’est la tendance en Europe et dans le monde, la France très en retard ne devrait pas y échapper. La seule gagnante sera la santé publique et les citoyens en tant que patients. La Haute autorité de santé a d’ailleurs appelé à accélérer un « puissant changement de logiciel » dans ce sens.

Exigences de proximité

Le projet de loi adopté par le Sénat est un article unique qui met en avant l’article L1411-11 du Code de la santé publique prévoyant « … La dispensation et l’administration des médicaments, produits et dispositifs médicaux, ainsi que le conseil pharmaceutique… » que « L’accès aux soins de premier recours ainsi que la prise en charge continue des malades sont définis dans le respect des exigences de proximité, qui s’apprécie en termes de distance et de temps de parcours, de qualité et de sécurité… ».  Il tient compte également de l’importance de l’officine dans l’attractivité des petites communes en tant que créatrice de lien social et de vie économique.
D’autre part l’ordonnance n° 2018-3 du 3 janvier 2018, relative à l’adaptation des conditions de création, transfert, regroupement et cession des officines de pharmacie permet aux communes de moins de 2 500 habitants d’être regroupées avec des communes contiguës, permettant ainsi l’ouverture d’une officine à leur profit. Car comme chacun sait il existe un numerus clausus, requis minimum de population desservie pour autoriser l’installation d’une pharmacie. Le problème est que l’article L. 5125-6-1 du code de la santé publique stipule que le nombre total d’habitants des communes regroupées dépasse 2 500 habitants et que l’une des communes ait au moins 2 000 habitants. Mais avec près de 30 000 communes de moins de 2 000 habitants, en France, la disposition est considérée comme ne prenant pas en compte la réalité du terrain en milieu rural particulièrement.

Loi d’assouplissement de l’installation officinale

Le texte adopté par le Sénat vise à faire appliquer les dispositions ci-dessus, ce qui n’est pas le cas, notamment en l’absence de décret d’application. Ce projet de loi vise en fait à contraindre le gouvernement à faire appliquer au 1er octobre 2024, décret paru ou non, ces dispositions pour les territoires dits « fragiles » – à ce jour non identifiées nommément – leur faisant bénéficier de facilités d’installation des officines.

Le ministre délégué chargé de la santé Frédéric Valletoux n’en est pas satisfait, déclarant : « Votre amendement étend le dispositif sur les territoires fragiles à tout le territoire ». En tout état de cause, le texte a été transmis à l’Assemblée Nationale le 12 avril pour la poursuite éventuelle de son parcours législatif, sachant qu’il divise avec des oppositions de la majorité et d’une partie de la droite, la gauche étant globalement favorable.

Image d’en-tête : Martino Pietropoli

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