Diabète : La Cour des comptes cible la prévention et l’obésité, mais son analyse est incomplète
Le rapport daté du 8 juillet 2025 est une alerte sur l’épidémie de diabète qui touche 3.8 millions de Français (2023) qui mise à juste titre sur la prévention de l’obésité pour réduire les coûts publics. Des molécules innovantes pour traiter ces fléaux sont néanmoins omises, affaiblissant sa portée et sa cohérence
Une épidémie aux coûts exponentiels
Le diabète, principalement de type 2 (92 % des cas), représente une charge majeure, avec 10,2 milliards d’euros dépensés par l’Assurance maladie en 2023, soit 5,3 % de son budget. Les résultats sanitaires stagnent : les examens de suivi comme la glycémie ou le bilan rénal ne progressent pas, 30 % des diagnostics en 2021 concernaient des cas avancés, et les complications comme les amputations ou les dialyses restent fréquentes, générant des coûts hospitaliers élevés. La Cour, dont la mission est d’optimiser les dépenses publiques, propose des mesures préventives, mais son silence sur des traitements capables de réduire ces coûts à long terme interroge.
Des inégalités marquées
Le diabète de type 2 frappe plus durement les populations défavorisées, avec un risque 2,8 fois plus élevé pour les 10 % les plus pauvres. Les territoires ultramarins, comme la Réunion, affichent une prévalence jusqu’à deux fois supérieure à la métropole. Ces disparités, liées à l’accès inégal à une alimentation saine et aux soins, soulignent l’urgence de mesures ciblées.
L’obésité ciblée… mais pas traitée
La Cour identifie l’obésité comme le principal facteur de risque du diabète et propose d’interdire la publicité pour les aliments à faible qualité nutritionnelle (Nutri-Score D et E) et d’étendre la taxe sur les boissons sucrées. Elle recommande également des parcours d’accompagnement dès le diagnostic, incluant éducation thérapeutique, nutrition et activité physique, via des outils comme le service Sophia ou « Mon bilan prévention ». Ces mesures préventives, bien que pertinentes, ignorent l’obésité installée, qui touche 17 % des adultes (Santé publique France, 2020), contre 6 % en 1980, soit une hausse de 183 %. Avec 34 % de la population en surpoids, l’obésité est une réalité massive que la Cour néglige de traiter.
L’omission des molécules innovantes
Le rapport passe sous silence les agonistes du GLP-1, comme le sémaglutide (Ozempic, Wegovy) ou le liraglutide, et les inhibiteurs de SGLT2, comme l’empagliflozine, des traitements novateurs à mécanisme d’action nouveau qui ciblent initialement le diabète et l’obésité. Ces thérapies, qui pourraient nécessité d’être prescrites à vie pour faire perdurer leurs effets, réduisent efficacement la glycémie et la sensation de faim et induisent une perte de poids significative. Approuvés pour traiter l’obésité dans certaines conditions, ils s’attaquent directement à ce facteur de risque clé du diabète. Leur coût, estimé à 800-1 200 euros par an pour le sémaglutide et 600-1 000 euros pour les SGLT2, avec une prise en charge partielle par la sécurité sociale. Leur popularité, amplifiée par les réseaux sociaux, a causé des tensions d’approvisionnement, comme signalé par l’ANSM en 2024.
Une analyse incomplète
Cette omission est problématique. Les complications du diabète, comme la dialyse (50 000-80 000 euros par an) ou les hospitalisations cardiovasculaires (milliers d’euros par épisode), pèsent lourd dans les 10,2 milliards d’euros dépensés en 2023. Les GLP-1 et SGLT2, en réduisant ces risques, pourraient générer des économies sur 5 à 10 ans, malgré leur coût initial. En ignorant ces traitements, la Cour sous-estime leur potentiel à alléger le fardeau financier à long terme, un manquement à son mandat d’optimisation budgétaire. Cette incohérence est d’autant plus frappante qu’elle cible l’obésité comme priorité, mais néglige des thérapies qui traitent directement ce facteur chez les patients déjà affectés. Le déficit de la Sécurité sociale (16 milliards d’euros en 2025) et les tensions d’approvisionnement des GLP-1 pourraient expliquer ce silence, tout comme une focalisation sur la prévention, jugée moins coûteuse à court terme. La Cour pourrait aussi estimer que l’évaluation des traitements relève des autorités sanitaires comme la HAS. Cependant, ces contraintes ne justifient pas l’absence d’une analyse coûts-avantages, essentielle pour une approche financière rigoureuse.
Une vision tronquée
En misant sur la prévention pour réduire les coûts, la Cour propose des mesures cohérentes, mais son silence sur les molécules innovantes récentes qui changent la donne car au-delà du traitement du diabète, elles sont capables de traiter l’obésité installée, et donc de participer à la prévention du diabète. Voilà une omission qui rend l’analyse incomplète et en partie obsolète. Alors que la Caisse nationale d’assurance maladie soutient les recommandations, une approche intégrant l’impact des nouveaux traitements qui visent un facteur de risque majeur qu’est l’obésité aurait mieux répondu à l’objectif d’optimisation des comptes publics face à une crise sanitaire majeure.
Illustration d’en-tête : Polina Tankilevitch
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