Thierry Ardisson, l’Homme en Noir qui brûlait les tabous et faisait vibrer la liberté

Thierry Ardisson, l’« Homme en Noir », s’est éteint le 14 juillet 2025, emportant une télévision où la provocation était un art et la liberté d’expression, un étendard. Sa mort, ironique en ce jour républicain pour ce royaliste assumé, scelle la fin d’une époque où les débats, de Bains de Minuit à Tout le monde en parle, vibraient sans filtre. Ardisson, maître du clash, incarnait une télé où l’on pouvait tout dire, à condition d’assumer. Ses plateaux étaient des arènes. Dans Lunettes noires pour nuits blanches, ses questionnaires à la Prévert déstabilisaient Duras ou Godard. Serge Gainsbourg brûlant un billet de 500 francs en 1986 reste iconique. En 2022, La première d’Hôtel du Temps ressuscitait Dalida via l’IA, une prouesse d’interview-finction à couper le souffle, controversée et stupéfiante. L’audience ne suit malheureusement pas, et Ardisson abandonne à regret cette émission, nommée aux Grammy Awards en 2023. etToujours moderne, jouait avec la technologie pour émouvoir et provoquer. Pour autant, Thierry Ardisson ne piégeait pas. Ses invités, de Salut les Terriens à 93, faubourg Saint-Honoré, savaient le risque de répondre à une invitation de l’Homme en Noir. Cette lumière de liberté s’est éteinte. Les plateaux, minés par la peur des procès ou accusations d’offense, sont aseptisés. Sa dernière polémique, en mai 2025, comparant Gaza à Auschwitz, l’a forcé à s’excuser, lui l’irréductible. Les réseaux sociaux, juges impitoyables, amplifient cette censure où un mot peut désormais ruiner une carrière. La disparition d’Ardisson et de sa télé incandescente enterre une liberté d’expression déjà fragile, dans une ère où l’on ne peut plus rien dire sans risquer l’anathème . Dans son dernier roman, il met en scène sa mort, et ce soir, nous verrons – déjà ! s’expriment des bien-pensants outrés – un documentaire sur Ardisson réalisé par son épouse, la journaliste Audrey Crespo-Mara.

Image d’en-tête : couverture L’Homme en Noir de Thierry Ardisson, paru chez Plon

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