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‘La France, Empire’ au théâtre de Belleville

Nicolas Lambert n’est pas présent sur la scène et il ne surgit pas des coulisses. Alors que le public est installé et qu’il attend patiemment, le voilà, Nicolas Lambert, qui déboule de la régie, comme s’il était un peu à la bourre et qu’il s’en excuse, priant au passage de bien vouloir éteindre les téléphones portables. Ce ne sera pas un spectacle comme les autres…

Nicolas Lambert n’a ni costume de scène ni décor, juste une chaise et un gros sac contenant quelques bouquins, trois fois rien, et il arrive sur la scène du théâtre de Belleville un peu comme on débarque dans une soirée entre copains pour donner des nouvelles. Ce ne sera pas un spectacle comme les autres…

En l’occurrence, Nicolas Lambert nous donne des nouvelles de sa fille, la petite dernière, qui l’a chargé de la rude tâche de corriger les fautes d’orthographe de son devoir de préparation du Brevet. C’est de l’Histoire et elle a eu comme sujet : « Montrez en quelques lignes que les militaires français agissent pour défendre les valeurs de la République. ». Rien que ça ! A seize ans même pas ! Et là, le père commence à lire. Mais ce qui retient son attention et l’indigne rapidement, ce n’est pas l’orthographe de sa fille, c’est le sujet qui lui a été posé et la réponse que sa fille a donnée.

Pas de sa faute, la petiote, si on ne lui a pas fourni les éléments de compréhension. Pas de notre faute, à nous autres, le public, si les livres de notre Histoire nationale ont été copieusement censurés.

Alors, à lui tout seul, avec sa chaise et son gros sac, avec son culot et son franc-parler, avec les infos qu’il a pu collecter dans les marges du savoir officiel, avec son art de l’imitation et de la caricature, Nicolas Lambert va nous raconter l’Histoire de la France Empire, une Histoire que personne ne raconte jamais, ou du moins très peu de monde, et qui se trouve être l’Histoire de la France « en pire ».

Nicolas Lambert nous explique qu’à la fin de la seconde guerre mondiale (pas la deuxième ! On l’espère bien), la France ne ressemblait pas à l’image de l’hexagone qu’on nous propose généralement mais qu’elle était augmentée du Maroc, de l’Algérie, de la Tunisie, du Cameroun, de la Libye, des Açores, de Madagascar, et de bien d’autres territoires encore…

Il va nous raconter comment la France n’aurait jamais réussi à vaincre l’Allemagne nazie, malgré l’aide des alliés, si elle n’avait puisé allégrement dans les réserves humaines de son Empire colonial. Il nous raconte comment la deuxième DB du Général Leclerc était, presque intégralement, composée de noirs, de jaunes, d’arabes, d’étrangers, de colonisés. Et comment, aux approches des Champs-Élysées, parce qu’il fallait « faire joli » sur les photos, les tirailleurs sénégalais furent exclus des rangs, et, lorsqu’ils osèrent réclamer la solde qu’on leur promettait depuis plusieurs mois, purement et simplement passés par les armes.

Nicolas Lambert nous raconte ce qu’on nous tait de l’Histoire de France, la part honteuse, celle qui est systématiquement occultée par l’Éducation dite « nationale ».

Et ce récit est à la fois consternant et hilarant, à la fois tragique et bouffon, c’est du Shakespeare et du Charlie Hebdo, c’est du Victor Hugo et du Ubu roi…

Ce n’est décidément pas un spectacle comme les autres que celui de Nicolas Lambert qui nous fait comprendre pourquoi, de nos jours encore, la France conserve des territoires lointains tels que la Guyane, Mayotte ou la Guadeloupe, héritages Ô combien honteux de ce passé colonial de la vieille France « en pire ».

Un spectacle fort, intelligent, intéressant tout en restant terriblement drôle et décapant. Ce n’est pas si fréquent !

Jusqu’au 20 dévembre 2025
Samedi à 15h30
Durée 2h

La France Empire’ de et avec Nicolas Lambert

Théâtre de Belleville, 16 passage Piver- 75011 Paris

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