Mylène Farmer vise et tape toujours dans le mille avec la tournée Nevermore et ses dates ultimes à Paris
C’est au Stade de France qu’a enfin pu débarquer cette tournée 2023 dont les deux dates parisiennes avaient dû être reportées l’an dernier ; on y gagne un troisième concert. 240 000 spectateurs ont répondu présent pour un show somptueux
Fans de la première heure… parmi d’autres
Mylène Farmer, c’est 40 ans de carrière, une douzaine d’albums (hors albums live et compilations) et 30 millions d’exemplaires vendus, la huitième tournée, et un succès jamais démenti dans une débauche de moyens et de records. Le budget de la tournée Nevermore 2023 est de 65 millions d’euros, du jamais vu en France. Cette longévité sur des décennies entière crée des liens intergénérationnels autour d’elle. Cela saute aux yeux en concert, on a toutes les tranches d’âge, des ados aux soixantenaires. Parmi ces derniers, les fans de la première heure. Pour en être, un signe de reconnaissance est de dire qu’on y était, à la première tournée de Mylène en 1989, au Palais des Sports de Paris. Cette série initiale de concerts n’avaient pas fait moins de 46 dates en France, Belgique et Suisse, pour un peu plus de 300 000 spectateurs, un mieux que ce que vient de faire Mylène en trois soirs au Stade de France…
Nevermore, en français « Plus jamais », qui laisse selon certains envisager un adieu à la scène, fait un hommage très clair à 1989, reprenant l’univers ultra gothique des débuts et les références à Edgar Poe, avec des corbeaux, des crânes et des croix. À sa sortie, l’affiche du concert de NeverMore 2023 (gauche ci-dessous), avec une image de Mylène dans l’œil d’un corbeau, avec une photo directement extraite des concert de 1989 (affiche à droite), ne laissait aucun doute.
Il existe aussi, un peu plus rares, les vieux fans de la toute première heure, ceux qui ont vécu ses touts débuts audiovisuels ; ceux-là traquaient les passages TV de l’artiste dans Télé-Loisirs et à la radio, armés de leurs cassettes VHS pour immortaliser les prestations de la jeune femme âgées alors de la petite vingtaine, déjà mystérieuse et inclassable. À force de les regarder à répétition et avec fascination, les bandes magnétiques se sont distendues, les magnétoscopes se sont usés. À cette époque, on ne gravait pas encore des CD. Depuis certains ont restauré ces trésors personnels dont beaucoup sont disponibles en ligne sur YouTube.
Troc de l’été naissant 2023 pour l’automne 2024
Manque de visibilité : il y a stade et stade
L’émotion intacte dans la perfection
Le spectacle était grandiose. Cela finit par paraître banal dès qu’on parle de Mylène Farmer, mais cette constance dans l’excellence mérite d’être pointée. Visuellement, malgré les problèmes de visibilité si on n’a pas un excellent placement, c’est une débauche de couleurs, d’ambiances et de décors magnifiques, le tout à couper le souffle. Des volées de corbeaux (ambiance oppressante hitchcockienne, référence au film Les Oiseaux) nous font passer du noir au bleu nuit dans une atmosphère crépusculaire que l’on retrouvera aussi dans le final avec une envolée en cage de Mylène. Le rouge intense, couleur de sang et de cœur, est omniprésent, mais aussi d’autres palettes de couleurs multiples. Les effets spéciaux sont omniprésents et parfaitement travaillés. Les chorégraphies et les danseurs sont au top, dans la lignée de ce que l’on connaît. Il faut dire que Mylène Farmer mène la danse sur des pas et une gestuelle particuliers qu’elle écrit elle-même depuis ses débuts, un style véritablement unique et des postures gracieuses. L’artiste maîtrise évidemment à la perfection son jeu de scène, jamais vulgaire ni ostentatoire, mais toujours sexy, et bouge avec une élégance naturelle dans des costumes somptueux mettant en valeur sa silhouette fine.
NeverMore est donc un hommage aux débuts et à la longue carrière de l’artiste. Dès lors elle a fait le choix d’une programmation musicale qui balaie bien les décennies. On a le droit à un invité, Simon Buret du groupe Aaron, pour Rayon Vert en version instrumentale piano, une composition du groupe créée de son initiative pour Mylène Farmer. Et puis un invité surprise, du moins pour nous les heureux du 27 septembre, avec le chanteur Seal. Il interprèteront leur bouleversant duo Les Mots (2021) en public pour la toute première fois.
Effusions musicales mais pas verbales
Le spectacle est millimétré, et Mylène na pas prévu de s’épancher avec des monologues introspectifs, des plaisanteries ou des remerciements verbaux appuyés. Faut-il s’en offenser ? Sûrement pas. L’artiste met tout dans sa musique et son spectacle généreux. Comme elle l’a souvent dit, tout ce qu’elle a à dire, elle l’exprime dans sa musique et son travail professionnel. Les concerts vont bien au-delà de la musique cela et on n’a absolument pas besoin de plus de cette artiste qui donne tout à chaque fois. Finalement, c’est ultra-professionnel, sincère et respectueux des public ; et tant pis pour les tabloïds et autres avodes d’anecdotes privées.
C’est mort ou c’est more ?
Comme précisé au début de cet article, un bruit a couru sur le fait que Nevermore 2023/2024 serait une tournée d’adieux. Un traduction littérale de l’anglais en somme, où l’on lit l’annonce d’un « Jamais plus » . Mais comprendre et apprécier Mylène Farmer, c’est aussi connaître et ne pas faire abstraction de ses nombreuses références littéraires dans son travail.
Pour « Nevermore« , ce mot est le leitmotiv, le cri du corbeau dans le poème éponyme d’Edgar Poe, en anglais ‘The Raven‘ (1845). Ainsi Nevermore y est scandé par l’oiseau à toute question de son interlocuteur, qu’il lui demande son nom ou des présages. Ce qui est intéressant, c’est que Poe avait expliqué avoir intensément travaillé ce poème avec « logique et méthode » pour qu’il plaise aussi bien à ses lecteurs qu’à ses critiques .C’est donc une œuvre très élaborée y compris d’un point de vue sonorités (rimes), presque musical, crépusculaire et mystérieux à souhait. Comme Mylène ? Nous on dit oui sans hésiter, pour la référence et sa pertinence.
Les fans érudits savent reconnaître les références « farmeriennes », ici un exemple de réponse implacable face à un internaute non averti :
Pour ces trois ultimes dates, Mylène Farmer a affiché à la fin des concerts au Stade de France un message discret mais élégant qui lui va bien : De NeverMore il faut retenir More. Une belle promesse, et en premier lieu le rendez-vous du 7 novembre pour la projection unique dans de multiples salles en France du film du concert, réalisé par le talentueux François Hanss. Attention, éternel recommencement en vue : il n’y a plus beaucoup de places disponibles, mais le distributeur, Pathé, a déjà annoncé l’ouverture de nouvelles salles pour cet événement.
Avant le concert Après le concert (Stade de France, 27/09/2024, Science infused
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