Points clés du rapport intermédiaire de l’OPECST sur les effets indésirables des vaccins anti-Covid et la pharmacovigilance
Ce rapport de près de 80 pages publié le 9 juin était très attendu car il a fait couler beaucoup d’encre tant sur la décision de lancer cette enquête que sur la légitimité de certaines personnes auditionnées. Nous passons en revue les grandes lignes de ce que révèle cette enquête parlementaire.
2 premières pages du rapport intermédiaire
Préambule : le déclenchement de la commission d’enquête et des auditions
Ils ont fait l’objet d’une controverse. En effet, la commission a été déclenchée par une pétition du 12 janvier 2022, moyen légitime dès lors que le nombre de signataires atteint 100 000 personnes. Or celle-ci ne comportait que 33 623 signatures atteintes en moins d’un mois. L’OPECST explique que le Parlement a tenu compte de la « dynamique » des signatures et du fait qu’il existait d’autres pétitions sur la même thématique pour lui confier cette enquête le 8 février, au sujet de la vaccination anti-Covid et du système français de pharmacovigilance.
Les 3 parlementaires rapporteurs ont conduit 23 auditions consistant en entretiens avec plus de 50 intervenants du 28 mars au 30 mai ainsi qu’une audition publique contradictoire le 24 mai. « L’Office s’est attaché à entendre l’ensemble des parties prenantes notamment celles à l’origine de la pétition citoyenne« .
À ce titre, Citizen4Science est restée silencieuse dans la polémique mais s’est étonnée de réactions sur les réseaux sociaux de « pro-science » s’indignant de l’audition de personnes considérées comme des désinformateurs ou anti-vax notoires. C’est pourtant le jeu normal de la démocratie, surtout s’agissant d’une enquête lancée sur la base d’une pétition citoyenne dont il convenait d’entendre les instigateurs et principaux supporters. Autant sur les réseaux sociaux, des clans peuvent se former et s’enfermer dans des bulles informationnelles, en excluant par exemple pour les « pro-science » des désinformateurs, autant dans la vraie vie, la voix des uns et des autres doivent pouvoir être entendues. Cette polémique étrange a été relayée étonnamment par Libération, donnant du crédit à ce qu’on pourrait qualifier de totalitarisme des réseaux sociaux exigeant de s’inviter dans le monde réel. Le président de l’OPECST, pris à parti de façon intensive par des internautes, a répondu à beaucoup d’objecteurs avec une leçon de démocratie. Il a été patient et à l’écoute de ces internautes indignés et accusateurs, on ne peut que l’en remercier.
Un système d’approbation des vaccins adapté à l’urgence Covid mal compris
Le dispositif réglementaire mis en place par l’Agence européenne du médicament (EMA) comportait 2 éléments clés :
- la « Rolling Review » qui est une évaluation en continu des données des études cliniques
- l’Autorisation de mise sur le marché (AMM) conditionnelle, ce dispositif permettant d’autoriser un médicament sur la base de données incomplètes et de façon temporaire. Ce dispositif n’a rien de nouveau. Il vise à combler un besoin médical sans avoir à attendre d’avoir un dossier complet ce qui aurait pris de nombreux mois et probablement généré des vagues bien plus meurtrières que ce que nous avons vécu. Ainsi : « la disponibilité immédiate l’emporte sur le risque représenté par les données manquantes », explique le rapport. À tort, certains ont poussé le public à croire qu’ils étaient « dans une expérimentation » en recevant le vaccin.
Le rôle clé de la pharmacovigilance et de la pharmaco-épidémiologie
À parti du moment où les vaccins ont été autorisés, c’est le système de pharmacovigilance qui recueille et analyse les événements indésirables dues au vaccin dans la population générale. Plus la population vaccinée est importante, plus le profil de sécurité s’affine, et bien évidemment plus on recueille d’événements indésirables dès lors qu’on vaccine en masse. C’est impressionnant en valeur absolu, mais c’est toujours de façon relative à la population vaccinée qu’il faut ramener cela, on regarde la proportionnalité.
L’enjeu, avec cette AMM conditionnelle, a été de développer un système de pharmacovigilance d’une nécessité absolue étant donné l’AMM conditionnelle avec des éléments reconnus comme à compléter.
Les centres sont parvenus à l’organiser malgré tout, et l’ANSM a mis en place des rapports de pharmacovigilance pour chacun des vaccins de façon régulière, apportant toute transparence. Les signaux de pharmacovigilance ont été communiqué au moment où ils apparaissaient.
De même et de façon complémentaires les données de santé pharmaco-épidémiologiques et médico-administratives ont été exploitées par le GIS EPI-PHARE pour quantifier les signaux issus de la pharmacovigilance, concourant à maîtriser l’évaluation du rapport bénéfice/risque des vaccins, dont le calcul reste un exercice complexe.
Grandes causes de défiance et de désinformation du public
- le mode non séquentiel de développement et approbation réglementaire des vaccins
Dans un monde « normal », sans urgence pandémique, les vaccins comme les autres médicaments sont développés de façon séquentielle : il existe différentes phase d’étude qui ont lieu successivement. On soumet le dossier quand toutes les phases de développement cliniques sont terminées, et on attend que les autorités aient étudié le dossier. Des années vont se passer pour obtenir l’Autorisation de mise sur le marché.
Avec le Covid-19, on a procédé différemment pour mettre le vaccin a disposition en temps utile, sans pour autant prendre des risques inacceptables.
La défiance à base de désinformation a consisté à faire croire que le vaccin restait expérimental. - la nouvelle plateforme vaccinale ARNm
Elle a été la source de défiance comme toute nouvelle technologie et prise d’assaut par les complotistes et désinformateurs à base de théories conspirationnistes multiples. - la perceptions des données d’événements indésirables
Il y en a eu beaucoup en volumes, ce qui est normal car les vaccins induisent par principe des effets indésirables dus à l’activation du système immunitaire mais surtout parce qu’on a vacciné en masse la plus grande partie de la population. La mauvaise compréhension de la balance bénéfice/risque est en cause.
Une communication à améliorer
Certains médecins et scientifiques ont porté le discours de l’état de la science dans les médias, mais de la part des autorités, la transparence et la clarté ont été insuffisantes or elles sont essentielles pour l’adhésion, dans un contexte de défiance et de polarisation sur les vaccins. Sur les effets indésirables des médicaments en particulier, le rapport souligne une insuffisance marquée de communication sur les événements indésirables, et aussi une prise en charge douteuse de certains patients ayant subi des effets secondaires et victimes « d’errance médicale ».
En outre, ce sont surtout les hommes politiques qui ont parlé en lieu et place des institutions de santé dont on attendait une communication sur les vaccins, comme l’ANSM.
Certaines polémiques, comme celle de la pénurie de masque en début de pandémie n’ont pas aidé, de même que l’exploitation du fait que les vaccins n’empêchent pas complètement la transmission comme on l’espérait, mais la réduise. Certains y ont vu, et exploité une défaillance de la science.
La polarisation de la société et des discours n’ont pas aidé (comme pro-vax vs anti-vax), la vérité scientifique doit prévaloir mais ne doit pas exclure la nuance.
On se permettra de rajouter que les médias et des journalistes ont laissé des désinformateurs transformer la perception de la science en opinion et se sont engouffrés dans le piège de tendre le micro à ceux qui parlaient le plus fort ou avec un discours séducteur (la science ne s’accommode pas du populisme).
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