Laïcité en danger : le proviseur du lycée Maurice Ravel démissionne et l’État poursuit l’élève au voile pour dénonciation calomnieuse
Harcelé et menacé, le proviseur a capitulé en démissionnant, L’école laïque et l’État dans le sillage du « Pas de vague » ? Gabriel répond non en annonçant des poursuites contre la jeune fille
Le 28 février, la jeune fille de 19 ans, élève en BTS dans la cité scolaire du 20e arrondissement de Paris, avait refusé de retirer son voile dans l’enceinte de l’école à la demande du proviseur. Celle-ci visait à faire respecter la loi, mais génère une altercation entre les deux et le chef d’établissement l’escorte finalement hors de l’école. L’élève l’avait ensuite accusé de l’avoir agressée physiquement pour arriver à ses fins, et un déferlement de violence à son encontre sur les réseaux sociaux avec insultes, harcèlement et menaces. L’ombre et le souvenir de Samuel Paty et plus récemment Dominique Bernard, professeurs assassinés, sont là. Les leçons sont-elles tirées ? La démission du proviseur est-elle symbolique d’un constat d’échec à préserver l’école laïque, un recul de la République ?
La ministre de l’Éducation Nicole Belloubet s’est rendue sur place et une enquête de police a été lancée sans délai, ainsi qu’une procédure disciplinaire contre l’élève. Cela dit, le rectorat de Paris a évoqué initialement un départ le 26 mars pour « convenances personnelles » et non un problème de mise en danger concernant sa sécurité pourtant évoquée par le proviseur. Un chef d’établissement qui allait prendre sa retraite en fin d’année scolaire, avec 45 ans d’ancienneté dont 7 à Maurice Ravel.
Indignation politique
Les oppositions politiques ont vite fait, Marine Le Pen en tête, de faire le constat d’incapacité de l’État à faire respecter la laïcité à l’école et d’en protéger ses défendeurs. Elles ont vite fait de blâmer la continuité de l’attitude « Pas de vagues », par coïncidence le titre du film sorti mercredi dont vous trouverez une critique d’ avant-première sur Science infuse : dans ce film, un professeur François Civil) est justement l’objet d’une dénonciation calomnieuse par une élève qui l’accuse de harcèlement sexuel. Il n’obtient pas le soutien de l’établissement scolaire qui tente d’éviter l’embrasement, et se retrouve menacé. Notre journaliste et critique le qualifie de « réflexion contemporaine »… ironie du sort.
De fait, c’est le flou pour tout le monde sur place, entre les élèves qui partagent mille versions de ce qui s’est réellement passé, et les professeurs qui s’inquiètent ouvertement ou font profil bas.
Poursuites contre l’élève récalcitrante
Le 5 mars, le Premier ministre Gabriel Attal avait reçu le proviseur démissionnaire menacé. Hier soir, il a communiqué au journal télévisé de 20h sur TFI et sur le réseau social X (anciennement Twitter) : « J’ai décidé que l’État allait porter plainte pour dénonciation calomnieuse contre l’élève qui a menacé le proviseur du lycée Maurice-Ravel. C’est un signal clair que je veux envoyer : nous serons toujours aux côtés de nos professeurs, de nos chefs d’établissement et de ceux qui font notre École. Je ne laisserai rien passer. »
À la télévision, il affirmera s’être « toujours engagé pour mettre fin au « pas de vagues ».
L’action annoncée fait suite au classement de la plainte déjà déposée contre elle par le Parquet au motif d’une infraction qui serait insuffisamment caractérisée. On parle donc ici des accusations supposées mensongères de violences physiques à son encontre qu’elle a attribuées au proviseur. Selon RTL, entretemps la jeune fille a dénoncé les menaces de mort et quitté le lycée, tout en maintient ses déclarations sur le déroulement de l’incident avec le proviseur et en assurant qu’elle est « passée à autre chose« .
Une dénonciation calomnieuse implique un mensonge, qu’il faudra donc prouver. L’élève récalcitrante encourt 5 ans de prison et 45 000 euros d’amende à ce titre, en fonction du préjudice subi par la victime.
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