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Kate Middleton : la maladie, la parallaxe et le complotisme

Les problèmes de santé princesse de Galles sont l’objet d’intenses spéculations sur les réseaux sociaux, où l’on essaie de démontrer que la dernière vidéo diffusée par Kensington serait un « deepfake ».

Catherine Middleton, épouse du Prince Harry, fils de feu Lady Diana et de Charles, est l’héritier du trône occupé par son père. Elle est très appréciée au Royaume-Uni, elle a la beauté, la classe et la prestance sans être du sérail royal. Roturière, elle n’est pas d’origine aristocratique. Comme Lady Diana (Spencer), la mère d’Harry, au destin tragique. Voilà la trame puissante source de spéculations à base de destinée.

Vendredi, le 22 mars, le compte X (ex Twitter) du couple princier a diffusé une vidéo de plus de 2 minutes en fin d’après-midi, dans laquelle Kate annonce être atteinte de cancer découvert suite à sa chirurgie abdominale récente, et qu’elle entame à ce titre une chimiothérapie préventive.

Notre président Emmanuel Macron y répondait d’ailleurs 3 heures plus tard avec un message de soutien.

La photo familiale à base de Photoshop comme terreau fertile

Après la chirurgie, de retour dans le bain médiatique, la princesse de Galles commet une lourde bévue : la publication d’une photo où elle est assise entourée de ses 3 enfants. Tout le monde est resplendissant de joie et semble en pleine forme y compris Kate, les enfants sont carrément hilares.

Très rapidement, la photo est contestée sur les réseaux sociaux par experts ou amateurs d’images prompts à découvrir retouches via Photoshop où autres outils. Tout ce petit monde fait un exercice de de datation des clichés et en conclut que cela date de la fin de l’année dernière, et en tout cas certainement pas après la récente chirurgie de Kate.

Le couple princier va rapidement passer aux aveux sur son compte X en donnant la parole à l’éditeur anonyme de la photo truquée, un certain « C »‘ :

« Comme beaucoup de photographes amateurs, il m’arrive d’expérimenter l’édition. Je tenais à m’excuser pour la confusion qu’a pu causer la photo de famille que nous avons partagée hier. J’espère que toutes les personnes présentes ont passé une très bonne fête des mères. »

On connaît la suite des aveux 15 jours plus tard avec la vidéo de révélation du cancer. Cela dit tout le monde a été bien refroidi la tromperie de la photo de famille. La méfiance va faire s’activer les mêmes amateurs et experts qui décortiquent les 2 minutes de vidéo sous tous les angles, ce qui leur donne dans les circonstances un certain crédit confiance.

Pléthore d’arguments de vidéo truquée

Voici un petit florilège de ce que nous avons trouvé comme arguments divers et variés plaidant pour une vidéo trafiquée. Ils sont plus ou moins valables et justifiés mais le premier qui nous a frappé, c’est celui qui dénote une inculture scientifique : celle de la méconnaissance de l’erreur de parallaxe. C’est un principe simple de physique et de perspective, qui fait qu’il existe, selon la position de l’observateur et surtout de son changement de position, un effet réel sur la perception de ce que l’on voit.

Ici par exemple, un militant du trucage de la vidéo avance que le banc sur lequel est assise Kate Middleton est faux, car les planches formant le dosseret seraient plus larges que sur la partie droit, de même leur écartement est différent de part et d’autre de la princesse (points rouges).

Ce problème de perspective est pourtant assez évident, mais quand on cherche avec un biais de confirmation, on trouve. Et on peut convaincre son public en raison d’une inculture scientifique. On comprend bien que la caméra avait été placée parfaitement face au banc, les planches nous apparaîtraient telles qu’elles sont en réalité, de taille identique. On n’aurait sans doute pas l’impression que Kate a une épaule plus haute que l’autre (flèche rouge accusatrice droite) si elle n’était pas assise en biais sur le banc.

Il y a un reflet étrange sur le banc de bois : le reflet des rayures de la manche gauche du pull. Cela accréditerait que la vidéo a en fait été réalisé sur un fond vert, technique de studio classique pour placer un fond de son choix. Cela semble effectivement le cas, mais cela ne remet pas pour autant en cause la réalité de Kate et de son discours. D’autres éléments viennent accréditer que la vidéo n’a pas été faite dans le jardin : les décrypteurs de la vidéo ont perçu des cheveux de Kate qui bougent comme soulevés par une brise, alors que le tapis de fleurs à l’arrière-plan et totalement fixe.

La thèse du deepfake

On passe aux choses plus sérieuses, avec les arguments qui veulent nous démontrer que la princesse de Galles n’a jamais fait ce discours et qu’il s’agit d’un personnage de synthèse, un deepfake. On sait que cette technologie donne des résultats époustouflants. La puce à l’oreille aurait été donné par les mains de la princesse sur la vidéo. De fait, les mains sont des organes complexes à reproduire quand on fait de la synthèse vidéo et c’est parfois elles qui révèlent une image travaillée avec l’intelligence artificielle (IA). Mais dans le cas présent, les détracteurs de la vidéo pensent avoir détecté une anomalie révélatrice : la bague à grosse pierre noire de Kate Middleton n’est plus visible sur certains plans, à un moment précis de la vidéo où la main dans sa gestuelle se penche à la verticale. L’argument ne tient pas la route pour beaucoup qui voient là un simple effet d’optique dû au flou généré par le mouvement de la main.

C’est ensuite la morphologie du visage qui est attaquée.. La mâchoire de la princesse serait beaucoup plus large et anguleuse sur la vidéo que dans la réalité. On parle aussi d’une fossette qui apparaît sur la joue habituellement quand Kate Middleton sourit, qui n’apparaît jamais dans la vidéo quand selon eux elle le devrait. Certains évoquent aussi un clignement des yeux anormalement élevé, argument rapidement mis de côté par d’autres en étudiant d’autres vidéos. C’est aussi la voix qui est attaquée, il s’agirait d’une voix de synthèse, des « experts » auraient analyse la bande son au ralenti et constaté des changements bizarres signant une voix virtuelle.
Enfin, l’argument vestimentaire de choc : la marinière de la princesse est la même que celle qu’elle portait dans un reportage de 2016. Alors, comment se fait-il que « comme par hasard », cette vulgaire marinière (pardon Armor-Lux, fleuron breton des marinières made in 100 % France, bien plus belles que celle de Kate), vêtement quelconque soit encore dans la garde-robe princière et sortie à cette occasion ? N’est-ce pas le signe de l’utilisation d’images anciennes pour fabriquer du neuf avec du vieux ? Pour porter encore cette thèse du deepfake, certains ne comprennent pas que le prince de Galles ne soit pas aux côté de son épouse dans cette annonce difficile de sa maladie éprouvante. À part parce que cela aurait été bien compliquée de faire un montage vidéo combinant un vrai prince avec une fausse princesse. Les pires complotistes la donnent bien évidemment d’ailleurs pour morte…

Réaction de la BBC

La presse anglaise nous apprend que la famille royale a choisi la BBC pour réaliser cette vidéo :

« Kensington Palace a choisi BBC Studios, la branche commerciale de la société, pour tourner la vidéo de la princesse de Galles annonçant qu’elle était soignée pour un cancer, en partie parce que la participation du radiodiffuseur empêcherait les spéculations les plus folles sur sa véracité ».

C’est donc sensé rassurer, mais c’est sans compter la logique complotiste qui veut que plus l’establishment est impliqué, moins c’est fiable. Une mécanique sans fin.

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