Novo Nordisk : après le diabète, quel effet économique de la percée d’Ozempic et autres analogues du GLP-1 sur la santé de l’entreprise ?
Science infuse a été l’un des premiers médias à aborder le sujet de cette nouvelle classe de médicaments dont le laboratoire danois est à l’origine, avec l’affaire du premier de cette classe pharmacologique, le sémaglutide qui a fait l’objet d’un détournement d’usage en 2022. Une fois n’est pas coutume, penchons-nous sur les retombées économiques pour la firme
On en parlait déjà, et en avance sur les médias « mainstream » dès décembre 2022 : l’affaire du sémaglutide (Ozempic), première molécule de la nouvelle classe des analogues GLP-1 était détournée de son utilisation pour le diabète comme coupe-faim pour maigrir, avec l’aide d’influenceurs de réseaux sociaux dont Elon Musk.
Ce détournement sauvage est vite devenu un repositionnement à l’aide d’études cliniques dans l’indication obésité avec du sémaglutide sous le nom de marque Wegovy. Son accès précoce (avant autorisation de mise sur le marché) est effectif depuis un bon moment en France alors que l’AMM .
Régime économique non amaigrissant
Les cours de bourse de Novo Nordisk font rêver, y compris les grands vainqueurs de la crise sanitaire comme Pfizer qui ont largement profité de l’aubaine des vaccins contre le Covid19, et déchantent aujourd’hui d’une opération d’engraissement éphémère, en raison de la fin de la crise sanitaire.
Le chiffre d’affaires de l’entreprise présente une croissance à 2 chiffres, et il en est de même pour ses bénéfices, et elle vient d’annoncer qu’il en sera de même cette année. On n’en doute pas, les ventes de ses produits agonistes GLP-1 étant bridés en raison de ses difficultés à produire suffisamment en réponse à la demande. Les choses devraient donc s’arranger cette année, puisque le laboratoire a préparé un plan spécial détaillé ci-dessous.
L’an dernier, la capitalisation boursière du laboratoire a augmenté de 48 %, ravissant la première place de capitalisation boursière détenue par la prestigieuse LVMH.
Wegovy en chiffres : 1,3 milliards d’euros de ventes…. au dernier trimestre 2023. C’est 4 fois plus que la même période l’année précédente. En 2024, les ventes devraient augmenter de 16 à 25 % pour un bénéfice d’exploitation de 3 points de plus. Ajoutons que ces chiffres tiennent compte d’une limitation des ventes par rapport à la demande. En bref, le produit va rester rationné le temps de développer pleinement la capacité de production.
Quant aux ventes globales de Novo Nordisk, sur le dernier trimestre 2023 on est à 37 % d’augmentation par rapport à l’année précédente soit 8,9 milliards de dollars.
La capacité de production comme enjeu essentiel
5 milliards de dollars sur 5 ans pouvant aller jusqu’à 7 milliards à l’horizon 2030, c’est ce que prévoit d’investir Novo Holding, principal actionnaire (à près de 80 %) de Novo Nordisk, a révélé le Financial Times en janvier dans le cadre d’une interview de son dirigeant. Il faut dire que les investissements s’avèrent rentables, ce qui conduit à de fortes capacités d’investissement pour développer le portefeuille de médicaments mais aussi, l’outil de production qui n’arrive pas à soutenir la demande d’Ozempic et Wegovy.
Novo Holding a d’ailleurs acquis un sous-traitant majeur, Catalent pour la fabrication de ces produits. Un investissement très conséquent de près de 17 milliards de dollars . La fabrication et le conditionnement sont un enjeu technique majeur et donc coûteux, s’agissant de produits injectables soumis à des normes notamment de stérilité. Les médicaments sont en effet fournis en seringues et stylos injecteurs préremplis permettant l’auto-injection par les patients.
Aujourd’hui, Calalent est déjà le principal fournisseur de Novo Nordisk pour les opérations de conditionnement primaire (remplissage des seringues/stylos) et secondaire (emballage) pour Wegovy, le sémaglutide pour l’indication dans l’obésité, marché en explosion.
Diabète et obésité, des marchés gargantuesques
Pour le traitement du diabète, Novo Nordisk est en quasi monopole avec le trio Sanofi (France) et les américains Eli Lilly et MSD. Un marché estimé à 85 milliards de dollars en 2023, qui pourrait atteindre plus de 100 milliards de dollars dès 2028.
Quant à l’obésité, on estime que le marché peut atteindre 77 milliards de dollars annuels à l’horizon 2030. Ajoutons que les agonistes GLP-1, s’ils sont très efficaces en termes de perte de poids et présentent un profil d’effets indésirables à ce jour tout à fait acceptable, il semble que l’arrêt du traitement ne permettent pas de maintenir les kilos perdus. Mais sur cet aspect aussi on manque encore de recul. Alors, un traitement à vie ?
Se pose aussi le problème de la prise en charge par les régimes de santé : les problèmes d’obésité sont pris en charge de façon variable, chez nous en cas d’obésité sévère et parfois si associées à d’autres pathologies (l’obésité étant elle-même source de pathologies). De quoi faire exploser les systèmes santé, ce qui donne des frayeurs, en même temps que la tirelire des labos pharmaceutiques gonfle.
Récemment, le directeur général de Novo Nordisk s’est félicité d’avoir traité en 2023 via ses produits contre le diabète et l’obésité plus de 40 millions de personnes.
Mais attention, le concurrent américain Eli Lilly arrive avec le tirzépatide, co-agoniste des récepteurs GLP-1 et GIP (également hormone intestinale mais à la localisation différente) commercialisé sous le nom de Stop, autorisé par la FDA fin 2023 (marques Zepbound aux États-Unis et Mounjaro en Europe).
Pour aller plus loin
Image d’en-tête : logo Novo Nordisk
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