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Léocadia de Jean Anouilh, au théâtre du Lucernaire

Nous voici encore au théâtre, s’exclame en préambule le narrateur de la pièce, Jean Anouilh lui-même, qui nous explique que le théâtre vient de ce besoin des êtres humains de se raconter et de se faire raconter des histoires, une façon de « donner au réel un sens qu’il n’a pas ».

Et de fait on nous raconte une histoire. Celle de la Duchesse D’Andinet d’Andaine qui a bien du souci dans son château de Pont-au-Bronc : son neveu, le prince Albert Troubiscol ne s’est jamais remis de la mort de la cantatrice Léocadia Gardi. Ces deux-là ne se sont aimés que trois jours, avant que la jeune femme ne décède dans des conditions dramatiques. Et, depuis trois ans, afin d’éviter que son neveu ne dépérisse, la Duchesse s’évertue à maintenir autour de lui tous les êtres et les objets qui ont constitué les circonstances de cet amour tragique et si bref : elle a construit une sorte de mausolée du souvenir totalement artificiel et dans lequel le beau ténébreux erre comme une âme en peine. C’est la raison pour laquelle elle décide d’embaucher la jeune Amanda, modiste de son métier, toute fraîche et naïve, et qui, par le plus grand des hasards, se trouve être le portrait craché de la défunte cantatrice.

Tel est le point de départ sur pièce consacrée à l’amour, au souvenir, à la mémoire, au deuil, à la pathologie des sentiments, et au besoin de théâtre.

Sur la scène du Lucernaire, une machine incongrue qui tient tout à la fois du manège enfantin et de la treille potagère, un manège-treille en quelques sortes, permet de faire tourner les cœurs et les esprits des personnages au rythme d’une valse désuète. Toute la pièce elle-même, d’ailleurs, tourne sur elle-même, pivote, s’ouvre, et passe ainsi de la comédie burlesque à la réflexion douce-amère, du conte de fées à la leçon de psychanalyse appliquée.

Jean Anouilh avait pour coutume de classer lui-même ses pièces en fonction de leur « couleur », c’est ainsi qu’il avait ses pièces noires, celles qui dévoilent un affrontement direct, telles Eurydice ou Antigone, ses pièces brillantes qui mettent en abîme le théâtre, telle Colombe, et ses pièces grinçantes, telle Pauvre Bithos. Avec Humulus le muet, Le bal des voleurs et Le rendez-vous de Senlis, Léocadia appartient aux pièces roses. Mais qu’on ne s’y trompe pas, le rose peut parfois déteindre.

Peut-être seulement, Jean Anouilh avait-il à cœur de faire sourire son spectateur en venant lui-même lui donner un ultime conseil : « Demain matin, étirez-vous au soleil et éclatez de rire ».

Mise en scène David Legras
Avec Camille Delpech ou Carla GirodValérie FrançaisDavid LegrasEmilien RaineauDrys Penthier ou Laurent LabruyèreAxel Stein-Kurdzielewicz ou Dominique Bastien
Musique Laurent Labruyère et Aliénor Guéniffet
Lumières Laurent Foiny
Costumes Jérôme Ragon
Scénographie David Legras
Décor (réalisation et construction) Jacques Poix-Terrier

Du mercredi au samedi à 21h | Dimanche à 18hjusqu’au 27 juillet 2025

Lucernaire, 53 rue Notre-Dame-des-Champs – 75006 Paris

Poche Montparnasse – 75 boulevard du Montparnasse – 75006 Paris

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