Sophie Huriaux : Grande, Seule et Vibrante sur scène
La Grande Sophie alias Sophie Huriaux, mêle chansons, lectures et danse pour dévoiler son âme dans un spectacle singulier. Entre confidences et rêveries, théâtre et concert, elle revisite ses neuf albums et une vie de projets artistiques, avec une émotion qui touche en plein cœur
Hier soir, à l’Espace Carpeaux de Courbevoie, La Grande Sophie (LGS pour les fans dont nous sommes), nous a offert ‘Tous les jours, Suzanne« , un spectacle inclassable et bouleversant, adapté de son premier livre paru chez Phébus en janvier. Seule sur scène, elle navigue entre enthousiasme, fragilité et puissance, dans une performance qui transcende les étiquettes : ni concert, ni simple lecture, ni comédie musicale, c’est selon ses mots un spectacle « hybride » intime où lecture et chant alternent au fil de l’évocation des événements d’une vie d’artiste. Un décor simple, avec des « spots » : une loge d’artiste, une malle qui évoque le voyage, un fauteuil cosy comme un chez-soi. Au fond, un écran qui s’avèrera subtilement onirique. Last but not least, sur leurs supports trônent quelques guitares, réparties sur la scène comme des totems. Pour La Grande Sophie, il s’agit on le sait d’instruments pour la composition, l’expression, mais aussi la médiation et la communion avec le public. Parmi elles, sa mythique Fender Stratocaster rouge et blanche, emblème de l’âme rock de LGS. On ne s’arrêtera pas là pour le mythique : La Grande Sophie porte ses fameuses Dr. Martens !
Nous découvrirons bientôt, comme les pétales d’une fleur qu’on effeuille des billets discrètement placés dans le décor. La Grande Sophie nous les lira, pas forcément rivée au texte car il s’agit de sa propre prose. Des missives autobiographiques adressées à Suzanne, sa confidente imaginaire. Ces mots éparpillés jalonnent un parcours musical, tels les cailloux du Petit Poucet, comme pour refaire le chemin à l’envers. Mais quand même, l’artiste nous racontera son histoire dans l’ordre chronologique, chaque événement marqué par la déclaration de son âge au moment dit. Obsédée par le temps qui passe ? Ce n’est pas la seule. D’ailleurs, on apprend qu’une chanteuse de 28 ans, c’est déjà une vieille, Dans le show business . Peut-être connaissez-vous cette chanson, extraite du somptueux album Des Vagues et des ruisseaux (2009). Extrait : « Comme un poulailler, dans le show business, on croise des poules, on laisse des plumes… Vivre la vie à l’envers, avant le placard »… Alors Sophie nous raconte trente ans de carrière, des bars enfumés de Port-de-Bouc, où elle jouait « au chapeau », à la conquête de la capitale, ses neuf albums et ses Victoires de la musique.
Letimotiv : Sophie voulait faire le métier qui lui plaît. Alors elle c’est accrochée à son rêve (et à son talent !). C’est la seule de la famille qui a réussi.
Suzanne, confidente imaginaire née il y a plus de dix ans d’un moment douloureux, prend vie dans la chanson éponyme de l’album La place du fantôme (2012). Ce disque, pour certains fans de notre connaissance, est un jalon : pour nous, il fut un moment de communion intense avec l’artiste. On la suivait presque à la trace dans son bus sillonnant les routes pour la tournée jalonnée de petites salles provinciales. On avait établir une connivence virtuelle mais bien réelle avec le mystérieux “ALPDF le fantôme” sur les réseaux sociaux, comparse étrangement lié au compte officiel de LGS. Sur scène, Suzanne, que LGS jouait en s’accompagnant d’une guitare acoustique, était un instant suspendu. Sa voix et son instrument , sa présence, tissaient une intimité rare avec le public. Dans nos pensées, une autre chanson de cet album qui en compte beaucoup, Écris-moi, résonne particulièrement ici : ce titre, qui parle de l’acte d’écrire comme refuge, fait écho au livre et au spectacle, où les lettres à Suzanne deviennent une bouée face au temps qui passe.
Avec une humilité désarmante, elle lit ses lettres, dévoilant ses combats : les remarques sur son âge dès l’âge de 28 ans donc, une grand-mère sévère l’exhortant à plus de sérieux, la présence de “Bob”, son compagnon depuis ses 22 ans, ancre de stabilité. Les chansons, réarrangées avec audace, sont mises en exergue. Seule avec sa guitare, elle dépouille Du courage, Martin ou Ne m’oublie pas pour n’en garder que l’essence. Chaque note, vibrante de résilience, fige le public dans un silence quasi religieux. D’autres joyaux resplendissent : Quelqu’un d’autre suspend le temps par sa mélancolie, Les portes claquent singulièrement, Hanoi transporte par sa poésie, Peut-être jamais nous serre la gorge.
On aurait voulu plus de ses derniers albums, tout particulièrement des morceaux extrêmement créatifs musicalement : Cet instant , ou Vendredi, à la pâtine disco, mais hier, c’était jeudi. Oui, La Grande Sophie nous parle sans fard du temps : les rides, les illusions perdues, mais aussi les joies, dansant avec une liberté instinctive qui contraste avec ses confidences graves. Elle fait rire avec ses souvenirs de pizzérias marseillaises, les friandises du « chapeau » qu’elle envoie au public, émeut en confessant ses doutes face à la page blanche.
Fidèle à son amour de la scène, elle improvise, échange avec le public, puis, comme souvent, elle le retrouve après le spectacle. Hier, elle a dédicacé son livre, offrant sourires et empathie sincère.

Scène spectacle LGS – auditorium Espace Carpeaux, Courbevoie – 12/06/2025 – Copyright Science infused
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