ActualitésAnimauxArtsChroniqueCritique théâtreCultureDessinFrance

« Dialogues de bêtes » de Colette au théâtre Poche Montparnasse

C’est un peu comme s’ils étaient quatre sur scène, un chat, un chien, une femme, un homme, et que ces quatre-là soient condensés en une comédienne, Lara Suyeux, plus la présence muette du dessinateur Cyrille Meyer.

Le chat, c’est Kiki-la-Doucette, le chien, Toby, et ils vivent chez leurs maîtres, Willy et Colette. Sauf qu’ici, dans ce spectacle, dans cet univers, ce sont les bêtes qui pensent, qui sentent, qui parlent et qui racontent. Kiki et Toby échangent, et se comprennent très bien, sur leurs petites manies de bêtes, leurs envies, leurs chagrins, leurs regrets. Et elles parlent tout autant des humains qui s’imaginent être leurs maîtres et qu’elles nomment, un peu dédaigneusement comme s’il s’agissait d’une infirmité, les « Deux-pattes ».

Le spectacle rassemble trois des quatre « Dialogues » édités par Colette en 1904 ( Sentimentalités, Le voyage, Le diner est en retard) auxquels a été ajouté l’un des dialogues paru longtemps après, en 1930 : Toby-Chien parle. L’idée, on l’aura compris, était à la fois de composer une sorte d’autobiographie décalée, désaxée, renversée selon une perspective inattendue et de donner la voix à ceux dont on croit en général qu’ils n’en possèdent pas. Parler des humains par le biais des animaux, parler des animaux qui côtoient les humains. C’était, à l’époque, d’autant plus important que, peu à peu, Colette se défaisait de l’emprise de son premier mari, Willy, lequel avait usurpé sa plume en signant la série des Claudine. Enfin, Colette prenait la parole en son nom propre ; enfin elle se libérait. « Je veux faire ce que je veux » dit-elle dans le dernier dialogue qui sonne comme un cri de révolte et une affirmation d’indépendance.

Au point de départ du spectacle, une commande de la bibliothèque des Sables d’Olonne auprès de la comédienne, Lara Suyeux : adapter et lire les Dialogues de bêtes de Colette. La comédienne se prend tellement au jeu qu’elle envisage rapidement d’en faire un spectacle ; c’est ce qui se produit à partie de 2024, avec la complicité de la metteure en scène Elisabeth Chailloux et du dessinateur Cyrille Meyer.

Quels que soient les mérites, indéniables, de Lara Suyeux, il était inévitable de ne pas chuter dans une sorte de complaisance et de sur-jeu systématique pour interpréter ces quatre personnages qui sont quatre personnalités diverses, étonnantes, intrigantes.  La vraie très bonne idée de ce spectacle est de filmer et de projeter en direct le travail du dessinateur Cyrille Meyer. Celui-ci ne se contente pas d’une illustration des récits mais il leur offre l’écrin du plus délicat des décors, aquarelle et feutre noir, qui évolue à mesure, magnifie les silhouettes, évoque une nature d’or et de dentelles. L’ensemble garde un côté vaguement rétro parfaitement en harmonie avec la langue de Colette qui sent son début de siècle. Un spectacle agréable et sensible.

Le dimanche à 17h et le lundi à 19h

Adaptation Elisabeth CHAILLOUX et Lara SUYEUX

Mise en scène Elisabeth CHAILLOUX

Avec Lara SUYEUX et Cyrille MEYER (dessinateur)

Sur une idée originale de Lara SUYEUX

Lumières : Olivier OUDIOU

Scénographie et régie générale : Simon DESPLEBIN

Son : Xavier JACQUOT

Costumes : Sophie SCHAAL

Photographies : Nadège LE LEZEC

Poche Montparnasse – 75 boulevard du Montparnasse – 75006 Paris


Science infuse est un service de presse en ligne agréé (n° 0329 x 94873) piloté par Citizen4Science, association à but non lucratif d’information et de médiation scientifique.
Notre média dépend entièrement de ses lecteur pour continuer à informer, analyser, avec un angle souvent différent car farouchement indépendant. Pour nous soutenir, et soutenir la presse indépendante et sa pluralité, faites un don pour que notre section presse reste d’accès gratuit, et abonnez-vous à la newsletter gratuite également !.

ou via J’aime l’Info, partenaire de la presse en ligne indépendante

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Résoudre : *
12 ⁄ 3 =