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« Filiation » de Sophie Médioni et Nolwen Ronde, au Studio Hébertot

Sur le plateau nu du Studio Hébertot, quelques éléments de mobilier délimitent trois espaces d’un même univers. Coté jardin, un bureau et un siège pour le bureau ; en plein centre, un canapé pour les loisirs ; côté cour, une table et quatre chaises pour la convivialité.

C’est dans cet univers triangulé qu’Alexandra Dumont, dix-huit ans, mène son existence triangulaire : papa, maman et l’enfant. Tout se passe pour le mieux dans le meilleur des mondes (maman est styliste, papa dans l’immobilier ; elle crée et il a de l’humour, on n’est pas chez n’importe qui) jusqu’à ce qu’Alexandra ne se lance dans un test ADN qui lui révèle qu’elle a quarante-trois pour cent de sang portugais dans les veines. Les parents se trouvent alors dans l’obligation de lui révéler la vérité : ils ont eu recours, pour la concevoir, au don d’ovocytes.

L’univers idéal de la jeune fille s’écroule : le conte de fées rose bonbon, sa petite carte postale faite d’un digne conformisme bien bourgeois, n’est plus. Et l’on assiste à la « détresse » d’Alexandra.

Filiation est typiquement le genre de pièce que l’on aimerait aimer, ne serait-ce que pour rendre service. Toute la partie consacrée au véritable parcours du combattant que connait le couple, passant par la FIV pour aboutir à la PMA, est bien mené. On regrette que la pièce ne fouille pas davantage cet aspect, à la fois documentaire et psychologique. On reste même carrément sur sa faim à de nombreuses occasions, par exemple en ce qui concerne le phénomène d’épigénétique. Ici se trouvait un véritable enjeu dramaturgique qui aurait pu donner une pièce forte.

En revanche, on peine beaucoup à s’intéresser à ce qui émeut la jeune fille qui, certes, désire légitimement connaître ses origines mais qui ne peut guère en vouloir à ses parents d’avoir tout tenté pour la faire venir au monde. Ou du moins, on ne possède aucun élément tangible pour nous faire comprendre et admettre le mal être créé par la révélation. On ignore, par exemple, la raison du silence prolongé des parents.

Le texte de Sophie Médioni et Nolwen Ronde est maladroit et manque cruellement d’intensité. Les enjeux dramatiques demeurent faibles et s’égarent même dans des digressions dépourvues d’intérêt, du côté des différents entre parents et enfants, de l’humour du père, des conditions de l’enfance, d’images de vacances au Portugal façon club méd., avec force fado et azuleros, etc. La mise en scène de Nolwen Ronde est, par moments, inventive et assez contemporaine mais s’égare, elle aussi, dans de grandes démonstrations virevoltantes et boursouflées. Au final, les comédiens ont bien du mérite et font leur possible pour demeurer crédibles au sein d’un spectacle qui n’a pas de véritable cohérence.

Studio Hébertot, du 5 au 27 mai 2025 – durée 1h15

78 bis, boulevard des Batignolles – 75017 Paris

Mis en scène par Nolwen Ronde
Avec Célia Giuliano, Bunny Chriqui, Sophie Médioni et Fabien Desvigne
Scénographie : Maeva Lu
Musique originale : Allan De La Houdaye
Affiche : Sahel Houdayer
Et avec la participation de : Sacha Robinet (image et voix), Savinien Malpelet et Margaux Lopez
Production : L’Art d’une nouvelle vie

Lavoir moderner parisien – 35 rue Léon – 75018 Paris

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